Soliloque sur le Vaste Monde, novembre 2020

-Entre culte et inculte   

-La France en son administration

-Eh bien ! Faisons la guerre !

-Joe, c’est aussi l’Amérique

Entre culte et inculte

Il est bien étrange de se découvrir ou bien le dernier des Mohicans, ou bien, une brindille dans l’incendie qui fait briller un phare pour l’humanité.

Tout autour de nous montent des esprits religieux de toutes sortes. Dans l’élection qui a secoué la planète et vu en Trump le représentant d’églises protestantes fondamentalistes, évangélistes/liques ou autres, on a parfois eu le sentiment que s’opposaient des conceptions de la vie en religion et non de la vie en société.

On découvre que tout ceci est loin d’être plaisant et que le télé-évangélisme n’est pas qu’une bonne affaire de contributions monétaires et de comptes en banque bien remplis. Il y aurait dans tout ceci de la foi, de la conviction et un intime rapport avec la divinité. Pour preuve, on nous dit qu’il faut faire attention à M.Romney, l’homme qui pourrait bien basculer d’une conviction vers l’autre et retourner la majorité du Sénat américain pour le pur et simple motif que ses convictions religieuses sont très fortes et prégnantes. Il est mormon, voyez-vous ! Et en tant que croyant, mieux encore en tant que croyant mormon, il n’est pas prêt à avaler toutes les couleuvres qui sortent de la bouche de Donal Trump. S’il croit si fortement en Dieu, le sort de l’Amérique changerait donc ?

Restons aux Etats-Unis avec le dernier juge (une femme) désigné à la Cour suprême. Tout le monde sait qu’elle est catholique. Ce n’est d’ailleurs pas la seule animée de ce type de conviction. Pourquoi est-il si important de savoir qu’elle est catholique ? allons, ne faisons pas l’innocent : je me souviens, enfant, à la fin des années cinquante, quand la démocratie chrétienne était encore quelque chose ! Je me souviens aussi que la nomination d’un ministre protestant n’était pas loin d’interloquer. Banquier, à la rigueur, mais ministre ?

Il me parait bien loin ce conflit à la française auquel nos élites à la française prenaient un fin plaisir. Alors, les Tala (ceux qui vont à la messe) s’opposaient (parfois physiquement) aux Patala, (ceux qui ne vont pas ta la messe) . Leurs joutes illustraient par pans entiers les subtilités de la société française.

Aux Etats-Unis, « in god we trust », c’est officiel depuis 1956 et ça ne changera pas. En France, au même moment où cette devise était actée par le Congrès, j’étais au lycée. Souvenirs, souvenirs… tel de mes camarades était renvoyé chez lui pour aller se rhabiller : il portait en évidence une médaille religieuse. Tel autre avait été vu à la porte d’entrée, il n’avait pas pensé à retirer son petit chapeau rond. Même punition. La devise dans ce lycée, comme dans toutes les écoles de la République : l’école c’est l’école, Dieu n’a rien à y faire. Ce n’était pas loin d’une version possible de la fameuse formule : la tolérance, il y a des maisons pour ça. La religion a aussi ses maisons et ce ne sont pas celles où la République enseigne les jeunes citoyens.

On sait que le bon Voltaire, déicide de conviction et d’action, accompagnait la signature de ses missives du célèbre : E.I (écrasons l’infâme) ! Tous les élèves savaient, grâce aux enseignements de la République, que ce n’était rien moins qu’un défi lancé à la divinité. L’âme laïque française vibra selon la mesure imaginée par Voltaire quand Laplace, génie mathématique et astronome, s’exclama « Dieu, je n’en ai pas eu besoin dans mes hypothèses…. »

Or, il parait que nous sommes entrés dans un monde qui prend plaisir à se soumettre aux divinités issues de religions monothéistes. Se soumettre c’est tout accepter quoi qu’il soit, quoi qu’il en coûte et surtout, ce qui est beaucoup mieux, soumettre qui que ce soit au non de quoi que ce soit.

Pour la foi laïque, l’honneur, n’est pas de débarrasser le monde des hommes du monde de dieu ; il est d’être convaincu que les Dieux ne méritent le respect qu’au même titre qu’une œuvre d’art ou un beau morceau de poésie : parce que justement, ce sont des œuvres humaines.

Mais pas davantage et jusqu’aux prochaines.

Joe, c’est aussi l’Amérique

 

Habemus papam ! Serait-ce un cri d’enthousiasme qui se serait répandu sur la planète saluant l’élection du nouveau Président des Etats-Unis? Ou, plus sûrement, un soupir de soulagement? Ou une douce musique sur le thème de la démocratie, qui, on le sait depuis que cette formule politique existe, l’emporte toujours, finalement… espèrent ses partisans.

 

Habemus papam ! En revanche, ce n’est pas à cet instant particulier de la vie des peuples et des Etats qu’on va se remémorer la célèbre formule qui faisait trembler tous les hommes d’esprit et de conviction humanistes : « le Vatican, combien de divisions ? ». Staline n’est plus pour faire trembler les faibles et leur rappeler que celui qui tient le bâton a plus de poids que celui qui manie la plume. Il a passé le témoin aux Etats-Unis.

 

Le Président des Etats-Unis est sinon l’homme le plus puissant du monde, au moins l’homme qui dirige le pays le plus puissant, celui dont les capacités militaires sont les plus imposantes, celui aussi qui domine le monde technologique, du calcul, des communications, de l’espace, des conquêtes scientifiques les plus audacieuses...

 

Tant mieux se rassurera-t-on in petto, il est préférable que tout ceci soit en de bonnes mains. Il nous paraissait que celles du Président Trump étaient davantage des pognes ou des poings que des mains qui nous parlent d’amitié, de « si tous les gars du monde… » etc. Tant mieux! Le nouveau Président serait un homme d’unité, de conviction et d’humanisme. Ses mains seront tendues vers tous « les gars du monde ». Elles brandiront la branche d’olivier de la paix, le lys de la pureté et les violettes de la modestie.

 

On se rassure comme on peut. L’histoire n’y porte cependant pas vraiment. Les Etats-Unis ont mis trois ans pour intervenir dans la 1ère guerre mondiale (mais reconnaissons que les Américains-allemands étaient fort nombreux), ils mirent à nouveau trois ans pour la seconde (sans jamais déclarer la guerre à l’Allemagne). Leur attitude à l’égard des Français dans différents conflits a été discutable. Le French bashing est devenu et demeure un sport américain, toutes catégories de populations confondues, démocrates comme républicains, et aussi toutes catégories de chaînes de télé ou de journaux…

 

En fait, rien n’est rassurant dans la conduite américaine, tant interne qu’externe ! Mais, après tout, ce n’est que le produit logique de la surpuissance. Les Etats-Unis sont "encore" le pays le plus puissant du monde : pour quelles raisons déraisonnables se comporteraient-ils « en un tas de chouette copains sympas » ? Bien sûr, c’est une nation tout imprégnée de religiosité (« in god we trust ») mais cela ne la conduit pas jusqu’à l’idéal qu’incarnent Saint Martin et son manteau. Les Etats-Unis ont quelques rapports délicats avec leur fameuse population afro-américaine ? Pour autant, ils ne sont pas hostiles à la diversité, qu’elle s’exprime en communautés ou en « pensée correcte ».  En revanche, ils ont beaucoup de mal à comprendre l’obsession laïcisante de quelques pays européens et leur méfiance vis-à-vis des musulmans ?

 

Donald Trump s’est comporté pendant quatre ans comme la caricature d’un Président des Etats-Unis, reniant les traités déjà signés, les engagements sociaux pris, les institutions héritées de la Seconde guerre mondiale comme celles qui étaient nées pendant la Guerre Froide. Ne s’agissait-il pas de rompre avec un leadership mondial, coûteux, sans réciprocité et sans vrai bénéfice ? Le peuple américain avait-il vraiment envie de continuer à se fourvoyer en subventions économiques, en protections militaires et en cadeaux sans retours au profit d'une bande internationale d'ingrats et de profiteurs? Trump n'a-t-il pas provoqué un retour à la réalité, "la réalité à l'américaine "celle où « the winner takes all »? Celle où la puissance financière d’Apple ou de Facebook en font de véritables « Etats au-dessus de l’Etat et de tous les Etats ». Celle où Saint Martin, à cheval, passe en sifflotant à côté du pauvre mendiant et lui pique son dernier haillon.

 

Rassurante cette élection ? Pas davantage que ne l’est cette formule terrible de Chateaubriand arrivant en Amérique : « Ce fut une esclave qui m'accueillit sur la terre de la liberté ».

 

Allons ! Secouons-nous et rendons son vrai sens au dicton : « on sait ce qu’on perd… on ne sait pas ce qu’on va encore perdre » !!!

 

 

La France en son administration

Il y a peu, j’ai eu une discussion passionnante avec un de mes amis, suisse de toujours et convaincu par les avantages de la « suissitude » comme disent certains socialistes français. « Comment, me faisait-il remarquer, pouvez-vous encore supporter votre administration ? ». S’ensuivirent quelques considérations sur l’absurdité des règlementations anti-covid, des papiers qu’il faut signer, des allers et retours administratifs, des politiques incessamment changées menées par des têtes d’œufs dont l’incompétence pratique se double d’une incapacité congénitale à entendre les souhaits de la population.

J’ai tenté de faire front jusqu’au moment où je me suis rendu compte que cela ne servirait de rien. Il était convaincu. Il en aurait fallu beaucoup pour le « déconvaincre » ! Je battis donc en retraite lâchement.

A peine avais-je achevé cette discussion que je « zoomai » avec un excellent ami, américain celui-là. Il s’était toujours abstenu de participer au French bashing qu’affectionnent ses concitoyens, mais, l’heure étant grave, tout le monde étant dans le même bain de covid, il me fit remarquer que nous étions quand même un peu clown avec nos app. Anti-virus. Quand elles fonctionnent, personne ne les charge, quand elles pataugent tout le monde s’empresse de le faire et de participer aux fous rires que les bugs déclenchent. Typique de l’administration à la française. Alors qu’aux Etats-unis, ou bien on laisse faire la nature, ou bien les grandes villes se débrouillent efficacement.

J’étais vraiment mal. Mais n’était-ce pas des amis ? Ne me disaient-ils pas des choses utiles ? Ne m’appelaient-ils pas à regarder autour de moi pour voir dans quel état de désolation nous nous trouvions, nous autres Français.

Je fus bientôt rassuré. J’avais imaginé un état de désolation. Un univers gris et morose. Des concitoyens errants entre des montagnes de papier surmontés de plumitifs ayant troqué la « sergent-major » contre le mulot chiraquien. Des innocents pourchassés par des gendarmes en motos deux-places pour vérifier des bouts de papier. C’était, en vrai, pure imagination. Tous, ou au moins un grand nombre, bien loin de la déprime étaient remontés comme des pendules. L’objet de leur vindicte : l’administration, ses suppôts, ses énarques, tous ces gens qui empêchent le bon professeur Raoult de vendre de la chlorotruc. Les énarques, évidemment, en prenaient pour leur grade, mais aussi quelques médecins, vendus au pouvoir, des journalistes sourds aux appels du peuple exigeant la vérité et non de l'information.

Finalement, les Français étaient d’accord avec nos voisins. Et même comme je le compris plus tard avec Erdogan, Bolsonaro et d’autres défenseurs de l’Homme et de ses droits face à l’Etat-moloch et à ses serviteurs-guinea-pigs (comme dans la Marque Jaune) : tous communiaient dans la même détestation de l’administration française.

Et moi, alors ? Ne devais-je pas aussi aller renverser l’idole monstrueuse ? Déboulonner ce veau dédoré et le jeter à terre, comme on le fit pour Staline, Lénine, le Général Lee et Christophe Colomb (et même, dit-on, Léonard de Vinci, parce qu’avec un nom pareil…).

Je me cabrai, me redressai et me mis à penser que je n’allais quand même pas me morfondre, pareil au « pauvre enfant vêtu de noir ».

De quoi sont faits les peuples m’écriai-je? Le Suisse n’est-il pas fort de son confort et ne fait-il pas tout ce qu’il peut pour ne pas s’occuper du monde ? Il reste chez lui et s’attache à vivre heureux. L’Allemand regarde le monde comme s’il s’agissait d’une pâte à modeler. L’Anglais, lui, a la Couronne. Et, après avoir regardé la saison 4, je peux comprendre que ça suffit à occuper l’esprit.

Tous ceux-là ont donc une âme voire un squelette qui leur permet de se tenir et de prendre la pose. Le Français, lui, n’aurait donc rien ? Il aurait à ce point « rien » que, même en province, la population s’en apercevrait ?

Il me vint cette pensée que c’était une preuve de cécité !

Les Français ont quelque chose que les autres n’ont pas et, jaloux, nous critiquent pour n’avoir pas à nous en féliciter : ils ont une administration. Elle vient de très loin. Avant même le Grand Roi. Déployée avec science, harmonie et goût de la géométrie euclidienne, positionnée où elle a décidé, dans sa grande sagesse, qu’il le fallait, l’Administration française est la France dans sa quintessence. Elle est l’âme et le squelette, et le pampre de la vigne et l’annonce du vin.

Procédant sans fatigue et marchant son chemin

 

 

Eh bien ! Faisons la guerre !

Récemment, dans la lutte contre le covid, deux moments ont été impressionnants. L’un, quand le premier ministre se prit à hausser le ton et à abandonner la posture du dirigeant au ton contrôlé et apaisant, en s’exclamant vigoureusement qu’il comprenait l’exaspération des commerçants et particulièrement des libraires mais qu’à la fin, on ne parlait pas de comptes d’exploitation mais de morts.
 
L’autre, quand le ministre de la Santé, frappé par la remarque d’un parlementaire qui se croyait ironiquement critique, lança que si la question du covid ne valait que de bons mots d’hémicycle, il était préférable que le député qui en était l’auteur s’en aille.
 
Revenons en 1918, en mars, les Russes devenus Soviétiques pactisent avec les Allemands, lesquels peuvent déplacer leurs troupes vers l’Ouest. A ce moment-là, juste à ce moment-là, Clemenceau dut affronter, les violentes critiques de ses adversaires politiques, qui n’avaient de cesse de l’attaquer malgré la gravité de la situation.
 
Il lança à ses opposants. "Je fais la guerre, que la guerre, Politique intérieure, je fais la guerre ; politique étrangère, je fais la guerre. Je fais toujours la guerre".
 
Comment Clemenceau aurait-il réagi quand l’adversaire politique déferle de tous les côtés et non pas seulement à l’Assemblée ou dans la presse ? Qu’aurait-il pu faire face à la déferlante des « réseaux » où on ne connait que le "bashing"? C’est tellement plus facile de balancer des vannes sur les « autorités » que de s’engager personnellement, intellectuellement, physiquement dans la bataille. En tout cas, on n’a pas vu un seul internaute demander au vu et au su de ses pairs où et quand il pourrait être utile. Ce ne sont que des réseaux, c’est-à-dire une version en ligne de cloaca maxima, le grand égout de la Rome antique !
 
Ailleurs, ce sont les fameux plateaux-télés. Avec les blouses blanches. Des dizaines d’épidémiologues et de virologues qui nous racontent toutes les erreurs qu’il ne fallait surtout pas faire et dans lesquelles, évidemment, les « autorités » appuyées sur le « pouvoir » se sont fourvoyées. Des dizaines de blouses blanches avec leur « Star » jouant les « Christ » en majesté à la une de Paris-Match. Mais pas un pneumologue. Ceux-là sont occupés à soigner les victimes de la pandémie. Ils n’ont pas le temps de faire plaisir à un journaliste en quête de sensationnel. « Alors, docteur, le gouvernement n’aurait-il pas dû… »
 
Hier, j’ai assisté à une sorte de reprise en main télévisuel: un rejet de ce sensationnalisme qui défigure la presse dite d’information. Malgré l’insistance du présentateur, un médecin, tranquillement, a répété les conditions de la réussite du confinement et en particulier que la responsabilité de chacun est incontournable. « Mais ce n’est pas ma question interrompt le journaliste…  je voudrais que vous nous disiez si « les Autorités » »…. Il n’a pas le temps de continuer. L’interviewé reprend la parole, sèchement : « Je viens de vous le dire et je le répète, le succès du confinement ressort de la responsabilité de chacun d’entre nous ». Mine déconfite du journaliste à qui ce médecin avait piqué sa sucette « les autorités… »
 
Enfin, se trouve la cohorte de tous les politiques qui, suivant l’Arsouille absolue, le «François» de l'Union de la Gauche, estiment qu’un opposant ça s’oppose et qui, donc, se sont installés confortablement dans le fauteuil douillet de l’opposant professionnel. Celui-là ne peut, par principe, participer au combat contre le mal, ce serait se compromettre avec les « autorités » ou « plus grave « avec le pouvoir »….
 
Et raisonnent à nouveau les paroles de Clemenceau : « Dans les circonstances actuelles, c'est que nous sommes en guerre, c'est qu'il faut faire la guerre, ne penser qu'à la guerre, c'est qu'il faut avoir notre pensée tournée vers la guerre et tout sacrifier aux règles qui nous mettraient d'accord dans l'avenir si nous pouvons réussir à assurer le triomphe de la France…… Aujourd'hui, notre devoir est de faire la guerre en maintenant les droits du citoyen, en sauvegardant non pas la liberté, mais toutes les libertés. Eh bien ! Faisons la guerre ».


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