Soliloques sur le Vaste Monde, Mars 2020

- 1 Ceux qui trahissent la France, doivent rendre des comptes

- 2 For he is a jolly good fellow

- 3 A Homme mondial, Virus universels 

Ceux qui trahissent la France, doivent rendre des comptes


 
Quand la pandémie, l’épidémie, du coronavirus sera derrière nous, « il faudra bien régler les comptes ». Voici ce qu’on lit dans la presse et qu’on entend sur les ondes.  Je l’ai dit, une fois, deux fois, trois fois : ceux qui auront eu à gérer ce drame auront à répondre de leurs actes.
 
Il n’est pas impossible qu’ils soient accusés d’avoir déclenché la crise.
 
Comprenons-nous bien, on ne les accusera pas d’avoir fabriqué puis diffusé l’horrible virus. C’est pire : ils ne l’ont pas empêché de passer. On n’a rien trouvé de mieux à faire qu’à rapatrier nos ressortissants de Chine. Le virus a pu s’informer des conditions réelles de la garde des frontières françaises et, avec le succès qu’on déplore, se porter à l’assaut de notre beau pays.
A l’époque de Tchernobyl, le pays avait été défendu. Le pouvoir n’était pas aux mains de représentants de la finance mondialisée. C’était François qui était là dont la main savait commander aux nuées comme aux écrouelles.
 
Donc, les frontières du pays laissées ouvertes, une troisième colonne s’est installée et a préparé la voie à l’invasion. « Les pouvoirs solides ne se montrent pas faibles » a dit un sage chinois. « Les pouvoirs qui ne sont pas forts se comportent faiblement » a répondu un logicien anglais. Nos concitoyens ont donc raison de vouloir demander raison à ce pouvoir si faible qu’il n’a pas pu prendre de fortes décisions.
 
Mais, est-elle là vraiment la vraie faute gouvernementale ? Je ne le pense pas.
 
Les dirigeants dirigent, voici une doxa simple, bien que souvent critiquée. Or, qu’ont dirigé les dirigeants pour faire face à cette crise ? Qu’avaient-ils prévu pour faire face ? « Gouverner c’est prévoir », s’exclamait Emile de Girardin. Voilà le bât qui blesse : au lieu de perdre son temps avec des traités sur le climat, des luttes contre la déforestation et des réfugiés syriens, le gouvernement aurait dû se mettre en ordre de marche face à un danger inconnu. Au contraire, il  n’a pas agi, jugeant qu'un événement inconnu, est imprévisible. Là était le vrai crime, la faute absolue qu’aurait dénoncée Talleyrand,
 
Le cygne noir voguait sur les flots du temps. Le Président de la République n’a pas compris le signe. Il fallait des masques, des ventilateurs, des hôpitaux et toute ces sortes de choses qui auraient permis de faire face à l’inconnu.

C’est dans tous les journaux. C’est dans la bouche des « ténors » de l’opposition. C’est dans les pensées des médecins qui sont sur le front.

« Il faudra régler les comptes ».

 
Au fait, d’où vient que ce futur s’impose. Les plaignants sont-ils encore à la recherche de motifs de se plaindre ? Veulent-ils prendre leurs marques comme de vulgaires traders qui accumulent le papier en pleine crise. « Il faudra… » n’est qu’une façon lâche de donner du temps au temps et de ne se mouiller que quand l’eau est à bonne température.
Non, décidément ! Ce n’est pas quand la plaie sera refermée qu’il faudra y porter le fer! C’est maintenant. C’est tout de suite qu’il faut dénoncer l’impéritie du gouvernement et de son chef. C’est maintenant, c’est tout de suite qu’il faut les juger.
 
L’histoire de la France est riche en critiques courageuses et en actions contre l’arrogance des pouvoirs établis. Encore proches de nous, pensons aux procès de Riom : la France, en pleine guerre, montra qu’il n’était pas question de régler demain les comptes d’aujourd’hui. Le Maréchal et ses amis traînèrent les responsables devant les tribunaux: ceux qui n’avaient pas prévu, les faux gouvernants qui avaient précipité le pays dans la défaite. On put à l’occasion de ces procès montrer à quel point les équipements avaient manqué et les moyens de détection de l’ennemi sous-estimés. On vit que tout avait été monstrueusement désordonné. La défense argua pauvrement de l’imprévisibilité des événements ? Pourtant, l’impréparation avait commencé au moins 4 ans avant les hostilités. Et on aurait pu remonter plus loin dans le temps si on avait voulu.
 
Mais on ne voulut pas. La question n’était pas de s’en prendre aux vieilles lunes mais de monter les bois de justice pour que les coupables fussent punis.

La France est éternelle. Le Monde entier attend que les Français montrent le chemin. C’est pourquoi, sans hésiter, sans attendre un demain qui sera trop tard, les plaintes se multiplient. Plaintes contre les masques qui manquent, plaintes contre la contamination du personnel luttant contre la contamination. Plaintes soutenues par 200 médecins qui ont décidé de faire rendre gorge à tous ceux, c’est-à-dire au gouvernement, qui n’avaient pas prévu et qui les ont mis en danger. Les plaintes pleuvent, la justice est saisie. Le Premier Ministre est visé, c’est le bras. Le Président ne perd rien pour attendre, c’est la tête.

 
Symboliquement, le procès contre les agissements du Premier Ministre et de ses acolytes se déroulera à Riom.

 

A Homme mondial, Virus universels 

 

Peut-être vient-on de rentrer dans l’ére de la raison abandonnant violemment, d’un seul coup, les postures fines d’intellectuels qui ont tout compris. La lutte contre la rougeole était sabotée par quelques malins qui vendaient, au frais de la sécurité sociale des prescriptions de liberté imprescriptible et des ordonnances anti-vaccins...

Je me souviens avoir longtemps vécu sous la double contrainte de la tuberculose et de la poliomyélite, accompagnée de tout le poids de leurs interdictions, ne pas cracher, se moucher, ne pas se baigner dans les eaux transparentes de frais ruisseaux courant sous des frondaisons délicieusement ombragées. J’ai connu les hygiaphones qui, évidemment, ne protégeaient que l’agent de la RATP. On les a vite supprimés : l’hygiène avait progressé à pas de géants.  

Je me souviens qu’il fut un temps où on était vieux à 60 ans. C’était il y a mille ans. Mille ans après, plus de limites. On s’entraîne à être le même pendant des centaines d’années.

Peut-être, d’un seul coup, les fantômes méphitiques du passé, viennent-ils de se réveiller. Ils nous secouent et rient de nos vies bizounours et nutella. Ils rient de nos indignations. De toutes les méchancetés que nous dénonçons. Ils rient de notre conviction béate d’avoir atteint un moment où tout plie devant l’Homme, l’intelligence, la nature, le climat. Ils nous disent « Pourquoi un virus déciderait-il de rester là où il est né alors que l’humanité ne cesse d’en appeler au mondial et à l’universel ». Et demain sera le genre humain.

On voit que le coronavirus provoque le repli sur soi pour mieux lutter contre ses conséquences malfaisantes. On entend M.Trump dénoncer les virus importés de l’étranger. Il y aurait des virus métèques ? Est-ce bien nouveau ? Le repli sur soi n’a-t-il pas commencé depuis quelques années ?

Les dénonciations Trumpiennes sont, en matière de virus, l’équivalent des blocages commerciaux multipliés et répétés. Elles ont leurs parentes dans les différents brexits, les revendications à l’indépendance de quelques provinces qui veulent vivre leurs vies sans être importunées par les autres.

Le virus qui se déploie renvoie au portrait de Dorian Gray. L’image révélée montre un monde qui, à la longue, au fil de ses inconsciences et de ses dénis, s’est délité, distordu et bien souvent trahi.

Un horrible financier a ricané que lorsque la mer se retire, on voit bien ceux qui étaient tout nus. Que va-t-il rester une fois que le virus aura été retiré ? S’il est retiré.

Le coronavirus ayant disparu, il faudra redouter que le monde retourne à son état primitif quand l’attente du cygne noir, le disputait avec le vol sinistre des corbeaux dans le ciel de Rome.  

 

 

For he is a jolly good fellow

 

Dans quelques précédentes livraisons j’avais suggéré que le type qui s’occupe de l’épidémie ne doit pas s’attendre à des félicitations. J’appelais à se souvenir des guerres du Péloponnèse quand les généraux athéniens victorieux étaient dégradés sur le front de la boulè, laissant ainsi à Sparte le champ libre. J’aurais dû ajouter que cette affaire s’était vraiment mal terminée à cause d’une épidémie de peste qui emporta Périclès lui-même.

Au fond, dans son malheur, Périclès avait eu de la chance. Une fois liquidé, on ne s’avisa que de chanter ses louanges. Mieux, nous ne pouvons pas penser à lui sans penser à Athènes, à sa gloire et à son rayonnement. Faut-il faire mourir un général pour qu’on se souvienne de son éclat? Napoléon devint une gloire inscrite dans le panthéon mental des Français du jour où, déchu, il s’en alla mourir sur une île sans intérêt.

Je ne souhaite rien de semblable à Emmanuel Macron. Je ne fais que le prévenir. Je veux aussi qu’il se souvienne de quelques sains principes. Imaginons un instant que Bonaparte, qui n’était pas encore Napoléon, ait mené la campagne d’Italie avec à ses trousses, la CGT, Marine Le Pen et le syndicat des fabricants de souliers de montagne.

Je vais m’efforcer de faire comprendre ce que je veux dire.

La campagne d’Italie a été une merveilleuse suite de victoires sur fond d’allers et retours, de désorganisation permanente, d’équipement insuffisant et de chaussures qui manquaient. Elle a été victorieuse malgré quelques embûches de la part des politiques parisiens. Il y avait un plan mais aussi pas mal de cadres supérieurs qui avaient le sens de la bidouille.

Retrouvons quelques mots modernes : "il n’a pas de plan, c’est manifeste". Un jour, il avance et parfois, il recule. Il veut prendre Mantoue et doit y renoncer. A Arcole, il lui faut payer de sa personne. La campagne sera dure et, écrit Napoléon à Joséphine, « il faut fusiller beaucoup ». La CGT, ne peut pas accepter qu’on fasse payer au peuple, les ambitions d’un petit général qui n’a pour mérite que d’avoir fait canonner la droite monarchique. Elle exige qu’on le débarque. Elle fait déposer des plaintes contre lui. Une centaine de médecins s’y collent.

Il s’est lancé dans la guerre sans prévoir un équipement ad hoc. Il traverse les Alpes n’importe comment. On ne compte pas les gelures dans l’infanterie. Ne parlons pas des chevaux, maltraités et, parfois, tombant dans le ravin. Madame Buzyn le clame sur tous les toits: elle avait prévenu tout le monde que gravir une montagne pour aller faire la guerre en Italie n’était pas raisonnable. Madame Buzyn, qui a l’oreille de quelques médecins, ne veut pas porter le chapeau. Finalement, le passage des Alpes c’est rien qu’un coup de bol. Les amis des animaux se maintiennent en embuscade.

Et le respect dans tout cela? Les hommes qui font des marches forcées! Parfois en sabot. On n’a pas commandé assez de chaussures. Parfois, ils sont obligés de charger à la baïonnette. On n’a pas prévu suffisamment de cartouches. Marine le Pen qui sait ce qu’organisation et finances veulent dire, ricane devant ce général à sabre de bois alors qu’il aurait suffi d'installer des murs autour de la France pour empêcher la deuxième coalition de pénétrer sur le territoire français. (et aussi les migrants).

Pendant les différentes étapes de la campagne, des soldats sont tués. Et ça, franchement, c’est absolument intolérable! Cest FO qui le déclare haut et fort. Certains soldats qui pensaient que l’Italie, c’était le chianti et le veau à la milanaise, ont décidé de faire valoir leur droit de retrait. Et même certains font valoir leur droit à la pré-retraite.

Les Français s’étonnent qu’on laisse à ce général le soin de porter le combat et de négocier des arrangements, des traités, des achats de masque et des tests sur la chloroquine. Ne parlons pas de ce Président qui prend prétexte qu’il a été élu ! Le Conseil d’Etat est saisi. Il prend position sur des questions essentielles, en particulier, les conditions dans lesquelles les Français pourront sortir de chez eux où ils sont confinés en sorte qu’ils puissent respirer un peu d’air à coronavirus.

L’histoire nous dit que la campagne d’Italie a été gagnée. Elle nous dit aussi qu’il y a eu débats et que, selon le Modem, Masséna aurait pu être cité un peu plus souvent. Les Républicains avaient une faiblesse pour Augereau. En tout cas, les Insoumis avaient prévenu tout le monde, "sous Bonaparte allait percer Napoléon", il fallait donc l’empêcher à tout prix de réussir, quitte à transiger avec l’Empereur d’Autriche et lui céder l'Alsace et la Lorraine. 

Bonaparte s'était indigné :« Si vous m’imposez des entraves de toute espèce, s’il faut que je réfère de tous mes pas aux commissaires du gouvernement, s’ils ont le droit de changer mes mouvements, de m’ôter ou de m’envoyer des troupes, n’attendez plus rien de bon… »

C’est un truisme que d’énoncer que le rôle d’un dirigeant, c’est de diriger.
 


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