Les articles de ce mois
- conférence sur l'Allemagne: le retour de l'empire allemand
- les Selfies sont de toute éternité
- Et si on exportait les prisons françaises en Islande?
Courant février, j'ai eu le plaisir de donner une conférence sur ce sujet devant les membres de l'Association des Diplômés du Centre d'Etudes Supérieures de Banque. Elle a été enregistrée sous forme d'une vidéo et l'Association m'a fait le plaisir de me passer les codes permettant d'y accéder. Je vous les livre ci-après.
Ils se présentent selon trois définitions.
Bonne vidéo.
- full HD : http://player.vimeo.com/external/120663307.hd.mp4?s=ee5929d4b8f026584f39060aa5360f7b
- haute qualité : http://player.vimeo.com/external/120663307.hd.mp4?s=ee5929d4b8f026584f39060aa5360f7b
- qualité standard : http://player.vimeo.com/external/120663307.sd.mp4?s=9091b17df62956c61be86a9ea294a7d9
- qualité téléphone mobile : http://player.vimeo.com/external/120663307.mobile.mp4?s=81970cb3d4037cda9746a6a6e3243c20
Je passai de la rive gauche à la rive droite, par le pont des Arts quand, observant les selfies en cours, je fus frappé par une lumière, non pas celle un peu trop électrique, un peu trop « vite fait - à la va-vite » des iphones et de tous les smartphones qui traînaient dans cet endroit. Je veux parler de la vraie lumière, celle de la connaissance, celle de la conscience.
Voilà comment l’histoire s’est présentée : je grimpais les marches qui conduisent sur le Pont des Arts quand je faillis me heurter à un selfie. Vous comprenez instantanément que se heurter à un selfie, un être fait de pixel, est aussi inconcevable que de savourer un peu de soupe quantique.
Je me suis heurté en fait à un selfie en cours de se faire, c’est-à-dire à la canne à selfie, ce morceau de ferraille sur laquelle on accroche un appareil à selfie pour prendre des selfies sérieux, pas des bricolés avec des angles de vue impossibles et des distorsions qui rendent le selfie ridicule.
Et la lumière me direz-vous ? Manquant de me heurter à la canne, sur l’instant, je découvris que le selfie, dont on pense qu’il est une invention moderne, était en germe depuis des millénaires. Le reflet de soi-même dans l’eau limpide d’une fontaine fut décidément le premier pas, rustique, accompli par l’humanité pour se voir elle-même (« self » en grec narcissique ancien). Le miroir a été une vraie et audacieuse tentative technique mais handicapé par la fugacité de l’image. Plus tard, on verra la photo d’identité continuer à tracer le chemin.
Ce qu’on sait moins: le selfie était là, présent, de toute antiquité. Il était entièrement contenu dans l’autoportrait. Comme, pour des raisons d’habileté manuelle, tout un chacun ne pouvait se portraiturer avec vérité, cette activité fut réglementée et laissée entre les mains des corporations habilitées par la puissance publique: celles des peintres de portraits. De fait, si on y réfléchit bien, un portrait est un autoportrait dont le sujet a délégué la fabrication à un tiers, le portraitiste. Portrait et autoportrait ne sont autres que des selfies faits à la main! Seule différence avec le selfie: ce dernier a une dimension industrielle.
En ces temps-là où le selfie se nommait portrait ou autoportrait, la canne à selfie se nommait pinceau ou crayon, ou burin... De nombreux instruments manuels compliquaient la fabrication de selfies. La canne à selfie a rassemblé tout cela en un seul instrument.
Vous allez protester. Vous n’accepterez pas cette idée que les plus grands artistes, Rembrandt, Van Gogh, etc., qui se sont auto-portraituré, parfois de façon maniaque, ont procédé dans le même esprit qu’on prend des selfies. Eh bien! j’insiste et je signe : ils voulaient se montrer à eux-mêmes et aux autres évidemment. On ne s’auto-portraiturait pas pour le secret du cabinet. De même les portraits étaient faits pour être vus. Une fois le portrait et l'autoportrait réalisés, on les accrochait au mur en espérant qu'ils seraient regardés. On les vendait aussi à des musées où circulent des gens qui venaient les voir. On diffusait comme on pouvait. Comme diffusent tous ceux qui prennent des selfies. Mais quand même pour eux c’est plus facile.
Les idées toutes faites nous tuent plus facilement que les pensées nouvelles, en matière intellectuelle et spirituelle, la prise de risque doit toujours être recherchée. La marche, n’est-elle pas un déséquilibre organisé ? Celui qui veut avancer ne doit-il pas se risquer à se casser la figure ? A l’opposé celui qui refuse cette prise de risque se transforme en statue.
Ce prologue pour traiter d’une question qui fera toujours mal : les prisons, leur implantation et leur gestion.
Et si les belges nous avaient montré la voie ?
Voici que les belges viennent de pulvériser les images et impressions communes. Ils ont attaqué la question de la prison en adoptant un angle novateur. Ils vont louer des prisons implantées dans les Pays-Bas. Regard nouveau, nouvelles idées: la mission de la prison est de produire de l’immobilité, en termes économiques la prison est un lieu de stockage. La localisation de la prison est donc un sujet sans intérêt et en tout cas moins intéressant que la question du coût. Toute localisation qui assure le maximum d’immobilisation pour le minimum de coût est bonne à prendre. C’est une véritable révolution copernicienne que nos voisins viennent de lancer et de mettre en application sur la base d’un accord passé avec les Pays-Bas. Les prisons belges seront externalisées et délocalisées. Ceci rompt totalement avec l’idée que la prison est le paradigme de la société. La position belge renverse de nombreuses idées reçues.
Michel Foucault avait réinstauré les prisons à égalité avec les hôpitaux, les maisons de fous, les sous-préfectures etc. « Quoi d'étonnant si la prison ressemble aux usines, aux écoles, aux casernes, aux hôpitaux, qui tous ressemblent aux prisons ? » disait-il, avec ce talent polémique qui a fait le succès de ses approximations. Quoi d’étonnant qu’un grand intellectuel brosse à grand trait un tableau de la société où la prison est le paradigme du bâtiment public ? Tout le monde s’y est laissé prendre. La prison focalisait un monde d’idées reçues.
Penser l’Hôpital est relativement commode. C’est un espace de production de la santé. À ce titre, il a beaucoup de points communs avec l’Usine. Outre le caractère technique d’espace de production qui déploie des réponses identiques à des contraintes semblables, ils sont traversés par des flux permanents d’hommes, de services et de marchandises, entrants et sortants et qui, par principe, n’entrent que dans la perspective de sortir. Dans les deux cas, l’accumulation de stocks est un signe d’inefficacité ou d’échec. Les malades de très longues durées, les vieillards qui sont parqués dans leurs lits ou sur des fauteuils roulants, tous ceux-là qui sont incapables de bouger, vivants ou morts sont autant de manifestations d’un ratage, comme les produits d’une usine stockés faute d’être vendus et qui sombreraient en « nanars » parce qu’inadaptés, trop chers, trop vieux ou trop peu fiables.
Peut-on étendre à la prison, comme Michel Foucault l’a si brillamment exposé, cette conception de l’Hôpital, sachant que la prison est l’objet de tous les désirs de pouvoir, qu’elle est le lieu où sont enclos ceux qui ont défié les pouvoirs et qu’elle est le symbole par excellence de l’exercice du pouvoir dans ce qu’il a d’ultimement contraignant. Si on suivait notre philosophe, tout militerait pour que la prison fût le plus prés possible des lieux de pouvoirs. La localisation de la prison serait donc surdéterminée !
Et si la localisation des prisons n’était qu’un sujet secondaire ?
C’aurait pu être une bonne idée, mais, non ! La prison ne ressemble en rien à l’Usine, ni à l’Hôpital. Une prison, c’est fait pour fabriquer de l’immobilité, pour reprendre les images industrialistes. Un hôpital, doit être dans la proximité la plus efficace possible des flux qu’il doit traiter, une usine et un tribunal de même. Une prison n’a pas à traiter de flux, elle est indifférente à cette contrainte de proximité. C’est dire que sa localisation est un aspect secondaire.
Si la prison ne peut pas être rapportée à l’usine, ni à l’hôpital, quelle est-elle ? Une partie de la réponse se trouve chez Michel Audiard « A partir de novembre, pour les clochards, il n'y a plus que deux solutions: la Côte d'Azur ou la prison ». Justement dit, l’hiver venant, la question est, pour cette catégorie socioprofessionnelle, de savoir où stationner pour éviter les souffrances liées aux frimas, aux blizzards, à la neige, à la pluie. Stationner, le mot est lâché. Pourquoi la prison ? Parce que c’est un bon refuge, un endroit qu’on utilise pour éviter de bouger. C’est un lieu de stockage, un lieu, où les flux sont réduits au maximum. Et de même, dans une prison, il n’y a pas de flux entrants et sortants. La mission d’une prison est d’éviter que bouge ce qu’on y a stocké. Une prison passoire est l’antithèse d’une prison. C’est un hôtel, une banque, un hôpital… où n’importe quoi de ce genre mais pas une prison. La localisation de la prison est donc un sujet sans intérêt et en tout cas moins intéressant que la question du coût
A ce stade, il faut maintenant oser. Ce que les belges ont été capable de concevoir, il serait quand même surprenant qu’une grande nation comme la France ne puisse pas le faire. La question porte sur l’éventuelle délocalisation et externalisation des prisons françaises, sur leur localisation, pour qu’on ait le plus d’efficacité et le moindre coût ?
Et si l’Islande était un bon territoire pour installer nos prisons ?
A priori, Il parait que la meilleure localisation est l’Islande. De la part de la France, ce serait un bel exemple d’entraide que d’y exporter les fonctions d’emprisonnement et de donner un coup de main à ce petit pays qui a eu tant de malheurs dans la crise financière et bancaire.
Parlons de coûts ! La devise locale s’est effondrée de 80%. Le prix du terrain à construire tangente zéro. Il y a de l’eau partout, ce qui est important pour la santé des prisonniers. L’activité volcanique réduit à peu de choses le coût de l’énergie consommée. L’émission de carbone peut donc être limitée. La main d’œuvre de gardiennage est disponible du fait du chômage et de la disparition des baleines. La compétence des indigènes dans le maniement du filet est rassurante pour ce qui concerne le retour des évadés. L’Islande est une île agréable et sympathique, à l’écart de tout, ce qui favorise l’immobilité (si les islandais avaient été mobiles, tout le monde le saurait et les USA auraient probablement été colonisés dès le 9 ème). Le poète a dit « il n'y a point de laides amours, ni de belles prisons » ! Il est bien connu que le paysage islandais est plutôt sévère tendance sinistre, il ne pourrait pas être abîmé par la présence des bâtiments pénitentiaires.
Tout concourt donc…et l’initiative belge nous montre le chemin.
Il y a pourtant une difficulté dans ce beau programme énonceront les esprits chagrins: la prison ne renferme pas que des condamnés à la perpétuité. Il y a des peines courtes, il y a des peines moyennes et il y a des longues. Le postulat, « il n’y a pas de flux, ni entrants, ni sortants » se trouve donc malmené. En réfléchissant, cet argument n’est que le sous-produit d’une lorgnette utilisée à contre-sens. Cela indique simplement que la peine longue légitime l’emprisonnement lointain, et inversement ! Donc l’Islande pour les longues peines (ou le Groenland) et l’Angleterre pour les plus courtes (ou l’Irlande). Selon la durée des peines, les établissements pénitentiaires seraient répartis sur des distances de plus en plus longues.
Et Les familles ? dira-t-on pour essayer de tuer une bonne idée dans l’œuf. La réponse est simple, ce sera pour elles une belle occasion de faire du tourisme. L’Islande qui est à la recherche de tous les moyens pour rembourses ses dettes ne manquera pas de faire des tarifs sympathiques et d’y ajouter activités sportives et ludiques propres à faire de ces visites de vrais moments de bonheur !
Les fameux esprits chagrins pourrait demander pourquoi on n’exporterait pas nos prisonniers ailleurs, en Afrique, ou même plus loin. Pourquoi ne pas penser à l’Atlas, au Hoggar….
Lorsque nous en serons là, une bonne et saine compétition entre pays d’accueil, aura déjà fait baisser les prix et réduira donc le coût de l’institution pénitentiaire. Le marché ira donc au mieux-disant. Le progrès que les Belges nous auront fait faire sera l’équivalent d’une révolution à la française.
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