- On vient de dégager les Rois Fainéants
- Exaspérations: je me moque complètement de la maison de Georges Bizet
- Et si on faisait l'éloge du compliqué?
- Le vent du boulet
- Peur sur Touiteur
- Μῆνιν ἄειδε θεὰ Πηληιάδεω Ἀχιλῆος…*
- La photo du nouveau Président
L’exaspération est l’aboutissement d’une succession de blessures bénignes souvent, violentes parfois. Elle peut s’exprimer de façon vigoureuse (je lui flanquerais volontiers mon poing dans la figure) ou violente (les deux musulmans qui poignardent un paysan dont la moissonneuse-batteuse fait trop de bruits).
L’exaspération peut aussi prendre le visage paisible du citoyen devant son urne : il va voter pour un extrémiste quelconque parce qu’il vient de découvrir qu’un « petit juge » a décidé d’un non-lieu vis à vis d’un pédophile notoire. Elle peut être aussi un jouet ou un artifice de discours ! Dans ces cas-là, l’exaspération prend diverses formes de mélanchonisation ou de lepenitude. Le politicien exaspéré est ici une sorte de medium qui assume toutes les exaspérations des exaspérés et s’efforce par une méta-exaspération de les sublimer en un vote triomphal.
Il faut compter parmi les exaspérations, celles qui relèvent du quotidien. Les voisins du dessus, qui, pour la énième fois oublient de fermer les robinets de leur baignoire, l’exaspéré qui tague votre voiture qu’il accuse de gêner sa manœuvre.
Ces exaspérations quotidiennes ne sont pas nécessairement le fait de gens qui veulent absolument mal faire ou qui font mal par désinvolture et parfaite insouciance. Elles viennent aussi de la meute des honnêtes gens qui veulent bien faire et qui accumulent les gestes du souvenir, de la mémoire, pour que rien qui a été créé ne se perde….
Ceux-là, ne sont pas les pires mais ils sont véritablement insupportables d’inconséquences et de gnan-gnantise. Je m’étais déjà insurgé contre la remise en état du musée dit « Henner » avenue de Villiers. Plusieurs millions d’euro pour un bâtiment qui n’a jamais appartenu au peintre afin de mettre en valeur sa peinture dont, à juste titre, à peu près personne ne se préoccupe. Talentueux peintre de la bonne société de la fin du XIXème siècle, ses œuvres devraient être exposées dans un quelconque musée des arts et traditions populaires. Cela illustrerait, par exemple, les expositions comme : « la vie des riches, il y a plus d’un siècle ».
On me dira que c’est de la méchanceté pure et simple et que les cars de retraités affrétés depuis la lointaine banlieue qui stationnent devant la « maison du Peintre Henner » prouvent qu’il a encore un public.
Soit, mais je viens de tomber sur une campagne de Crowd funding pour sauver la maison de Georges Bizet à Bougival. On voudrait y créer un espace Carmen ! il faudrait 3 millions d’euros. On rêve ! 3 millions d’euros pour bidouiller un soi-disant lieu mémoriel où il faudra aussi installer, un conservateur, un secrétariat, des commissaires à la musique et peut-être une chanteuse à demeure pour entonner « l’amour est enfant de bohème » au moment où les cars de retraités déversent leurs cargaisons.
Quand on voit ce qu’on a fait du jardin de Monet !
Rendez-vous compte du nombre de grands et petits artistes qui ont vécu en France. Rendez-vous compte du nombre de maisons à la campagne et à Paris qu’il faudrait protéger, restaurer, remettre en Etat, préparer pour les cars de retraités, avec les rampes pour les fauteuils à roulettes et les portes qu’il faudra mettre aux normes des handicapés obèses (il n’y a pas de raison que les obèses n’aient pas accès à la culture).
Rendez-vous compte du nombre considérable de ces maisons de morts qu’il faudrait rendre à la ferveur des publics et préserver contre les atteintes d’une urbanisation violente et agressive, capable de passer sur le ventre des vieilles maisons et des appartements de nos artistes et musiciens et sculpteurs et doreurs et menuisiers etc…
Rendez-vous compte que tout cet argent est dépensé en pure perte : 9% des musées français rassemblent plus de 75 % des visiteurs de musées. Le reste c’est pour les 8000 musées qui vivotent à droite et à gauche.
Rendez-vous compte que si des gens sont capables de donner tant d’argent pour des enjeux aussi epsilonesques, il n’y a aucune raison d’être modéré en termes de fiscalité.
Pour se résumer : je pense que le fisc devrait se faire communiquer les noms et adresses de ces généraux donateurs de l’inutile pour proposer une taxation utile à la collectivité.
Je serai alors moins exaspéré.
On se souviendra toujours de cette phrase en forme de pensée, au balancement classique et à la formulation provocatrice. « Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples ». Combien de fois n’a-t-on pas eu envie de la dire, de la contrefaire, de la détourner cette phrase si belle et si élégante. « Vers l’Europe… vers le concert des Nations….» ? Combien de fois a-t-on pensé que c’était bien du Général que cette capacité à passer par-dessus la tête des détails, des accidents et des phénomènes ? Combien de fois s’est-on laissé aller à penser, à dire même, que voilà, bien fort clamé, l’esprit français par excellence, cette belle aptitude à ne pas s’embarrasser des histoires, toujours petites, pour ne s’intéresser qu’à l’Histoire, la Grande, carrière où les grands hommes sont animés de grandes pensées, champs ouverts où les grandes pensées s’ébattent librement dans toute leur simplicité.
A-t-on payé, dans ces quelques lignes, le tribut qu’il convient à la simplicité ?
Dire les choses simplement.
Agir selon des principes clairs, nets et transparents c’est dire et agir au nom de la simplicité, hors de tous sous-entendus, hors de toute trivialité, à l’écart de toutes les ruses, de toutes les arrière-pensées qui font qu’un projet, un acte ou un objectif se transforment en moyens de combat, en armes pour le pouvoir ou en instrument de détournement des esprits confiants et des âmes innocentes.
Les choses simples ne sont-elles pas inscrites dans l’ordre naturel ? Les discours des grands simplificateurs ne sont-ils pas en harmonie avec le « grand livre » de la nature dont les pages sentent bon l’humus et les sous-bois. En toute simplicité, il faut aimer la terre, celle-là «qui ne ment pas». Ah, Emerson ! Ah, Thoreau ! Couchers de soleil sur les glaciers, avec Leni Riefenstahl qui gambade dans la montagne à la recherche de la pure image de la simplicité ! Ah, regards bleu acier et mentons carrés ! Regards noirs comme la braise après l’incendie ! Combien de discours compliqués n’avez-vous pas renfoncés dans les gorges d’intellectuels tordus?
L’eau de roche, la lumière qui inonde et les mots simples mettent à bas les demi-teintes, les ombres et les pensées sinueuses, dangereuses, blessantes et mortifères.
Le tribut est payé ?
Cher. Très cher.
Dans l’ordre du simple, du direct, du « sans affèterie » et du « sans embarras » intellectualistes, que doit-on préférer ? Le fameux « tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens !» ou le célébrissime « pas de libertés pour les ennemis de la liberté » ? Ne sont-ils pas l’expression par excellence de la simplicité en action. Pourquoi procéder à une recherche des faits, des responsabilités, des culpabilités, de leur atténuations même et, pourquoi pas, des circonstances atténuantes, alors qu’il est si simple de laisser le souverain-juge décider « in fine». Alors qu’il est si économique et commode de laisser agir le fil de l’épée.
Ce qui est simple est oppressif ?
N’est-ce pas une provocation ? Ce qui est simple ne protège-t-il pas le vertueux face aux labyrinthes des « corps constitués », aux méandres des cheminements citoyens, aux scribes et aux docteurs, aux livres de lois, aux codex, aux codes, aux parchemins emplis de signes incompréhensibles et aux formulaires couverts de cases à remplir ? Accuser le désir de simplicité de dégager des relents marécageux ! Soutenir que le regard direct et limpide est louche et chassieux ? Tout ceci ne revient-il pas à accuser le miroir de renvoyer trop fidèlement les images ?
La simplicité, la clarté et la transparence exigées comme vertus de la pensée, des comportements et de l’action ne sont, à les considérer, de près que des moyens sinistres pour mieux entraver, asservir et emprisonner, les hommes, leurs pensées et leurs actes.
C’est dans la règle portée et posée par l’esprit humain que se forge l’esprit de liberté. Les rouages compliqués que les hommes s’imposent et qu’ils nomment « Cité » ou « vie en société » sont garants de l’homme et de sa liberté.
Tant pis pour toi, Antigone: les hommes, leurs œuvres et leurs cités sont compliqués.
Hélas ! Tant pis pour les grands classiques. L’unité de lieu, de temps et d’action privent du vouloir et du pouvoir et le désir de simplicité est un attentat perpétré contre l’homme et contre sa liberté. Le marché où se croisent des courbes simples et où se déterminent les projets futurs d’individus libres et consentants est l’exemple par excellence d’une pure et parfaite illusion. Les mathématiques appliquées aux sciences de l’Homme forment l’ultime tentative de tout simplifier dans les actes, les pensées et les projections. Invoquer une main invisible et lui conférer le pouvoir de sauver l’Homme est un avatar de l’appel à la gouvernance divine, à sa clarté et à sa simplicité.
Il faut jeter au loin les livres petits et uniques de toutes les couleurs. Doivent être dénoncés traitres à l’humanité, ceux qui traitent de l’écriture et de la pensée comme on traite d’un coucher de soleil, de l’eau du torrent ou de la surface lisse et claire des lacs de montagne. Le complexe, le compliqué, le sinueux, le courbe, inscrits en lois et en institutions, accumulés par les hommes tout au cours de l’histoire sont autant d’indicateurs, de critères et de signes que la liberté a progressé.
Et s’il faut un exemple de la complexité qu’il faut chérir, prenons l’Europe ! Voilà le plus bel univers compliqué de la terre ! On y a rassemblé pour une chose commune des hommes qui ne se comprennent même pas et sont pourtant appeler à œuvrer ensemble. On y a uni des hommes qui ont passé des siècles à se haïr avec beaucoup de simplicité. On a bâti une improbable maison commune où se combinent des dizaines d’esprit des lois et de « contrat social ».
Havre de paix et d’Humanité par la force et le jeu de toutes ses complications?
* Chante, ô déesse, le courroux du Péléide Achille…
Les ministres du nouveau gouvernement sont-ils des « deutschen Ministers » . Edouard Philippe, Bruno Le Maire sont de parfaits germanophones et Sylvain Fort et Sylvie Goulard comme Philippe Etienne, nouveau conseiller diplomatique à l’Elysée…
Dans le gouvernement socialiste seul Jean-Marc Ayrault, ancien professeur d’allemand, pouvait essayer de s’exprimer en Allemand mais c’était bien rouillé. L’Allemand était si peu apprécié de l’ancien Président qu’il avait supprimé les classes bilingues français-allemand. « Trop élitistes » disaient ses conseilleurs pédagogiques. Trop élitiste ?
Comment comprendre cet afflux de germanophones ? Une bonne partie, sinon la majeure partie des hommes et des femmes qui viennent d’arriver aux affaires appartiennent à la génération « d’après ». Celle à qui on n’a pas infligé le grec et le latin. Ils le doivent à leurs parents qui avaient subi l’idée "humaniste" que les langues vivantes étaient celles des "commerçants" ! Comme leurs carrières en avaient pâti, ils firent tout l’inverse pour leurs enfants. Autrefois, les bons élèves choisissaient la filière A’ ? (Math, grec, latin) : à l'opposé leurs enfants apprendraient l’allemand au lieu du grec. Le latin, plus facile, serait remplacé par l’anglais.
Nos dirigeants ne sont pas germanophiles, ils sont tout simplement issus des formations les plus élitistes. L’allemand est un peu plus difficile que l’espagnol ou l’anglais. Les classes d’allemand rassemblaient les meilleurs. Ou, dit autrement, les parents exigeants pour l’éducation de leurs enfants les rassemblaient dans des classes où l’allemand régnait en maître.
Evidemment, si, en plus, ils faisaient du grec….
Ecoutons Joxe*, mitterrandien idolâtre et nouveau Fouquier-Tinville, qui lançait à une droite laminée : «vous avez juridiquement tort par ce que vous êtes politiquement minoritaire».
Imaginez que la nouvelle majorité veuille imiter les
godillots roses des socialistes de Mitterrand !
Souvenons-nous des tirades de F. Hollande quand il avait
(déjà) perdu une élection : la France serait menacée par «une majorité écrasante qui écrase, un parti dominant qui domine, des pouvoirs absolus qui gouvernent de façon absolue».
Les récentes élections sont-elles grosses de plus graves
menaces ?
«A trop gagner, on perd le sens des défaites», «trop de
majorité tue la majorité», «ceux qui gagnent aujourd’hui devraient se souvenir qu’on peut perdre demain», «une majorité écrasante écrase la minorité, ce n’est pas ça la démocratie», «la
démocratie c’est donner aux plus faibles tous les droits pour que le plus fort n’en abuse pas : honneur au parti socialiste».
Les partis politiques qui viennent d’être passés à la
moulinette s’entendent tout uniment pour dénoncer les risques que la démocratie encourt.
Un parti inconnu transformerait le paysage politique
français en champ de ruine ? Du passé, il ferait table rase ? Cela ne peut pas annoncer de bonnes choses. Penser qu’une majorité jeune et nouvelle pourrait prendre des décisions fait
froid dans le dos. Et la continuité ? Et les droits acquis ?
Que penser de toutes ces
non-pensées ?
Ceci : il faut espérer que le temps des rois fainéants
est fini et qu’un maire du Palais vient de les remplacer.
* en fait, le propos fut tenu par André Laignel, mitterrandien tout aussi idolâtre!
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