Soliloque sur le Vaste Monde, février 2024

 

-Oh là là, Paris! C'est la vie !

-Ils sont enchanteurs les croassements des reinettes des bois

-читай по моим губам

-Le déclin de l’Occident a beaucoup d’avenir (O.Spengler)

-« Sit lux » ! et la lumière tremblota

 

Oh là là, Paris! C'est la vie !


On raconte toujours Paris comme si la vie n'y avait laissé, tout au long de centaines d’années, que de belles traces, de beaux bâtiments, de belles gens et de belles lumières. Il est vrai que dans les livres et, surtout, les films, « Si Paris m’était conté », « Les Trois mousquetaires », « Les mystères de Paris », la ville, en met plein la vue mais n'a pas d’odeur !!!

Or, Paris, pendant des siècles et jusqu'au milieu du XXème siècle, était une zone industrielle à ciel ouvert. On y produisait des tas de choses, on y accumulait des tas de déchets (y compris humains), on équarrissait, tannait, fumait. On y déféquait et en déversait le produit par la fenêtre des habitations (avec un cri d'avertissement « gare, l’eau »). Tout près du Parc Monceau, on traitait les métaux, on traitait les surfaces, le plomb, le cuivre. Des fumées nocives s'épanchaient à deux pas des plus beaux hôtels de la bourgeoisie. La Seine était polluée et ses poissons étaient immangeables. Ses affluents parisiens étaient réduits à l'état d'égouts industriels. La Bièvre voyait passer tous les résidus des équarisseurs, des peauciers, des tanneurs. Le boulevard Bonne Nouvelle avait été creusé dans des immondices accumulées pendant deux cents ou trois cents ans : l'odeur était telle que personne, même avec les subventions du Roi de France, ne voulait s'en approcher!

Le Mont Parnasse et quelques "montagnes" parisiennes n'avaient pas d'origine naturelle ! Quelques « vides », des carrières abandonnées, avaient été converties en dépôts d’ordures. La butte Chaumont, un trou gigantesque, avait été transformée en montagne de détritus, résidus de matériaux de construction, restes d’équarrissage des chevaux de trait arrivés au bout du rouleau, accumulation d'ordures etc .

Il est vrai que dans ce monde peu ragoutant, les riches étaient à l’abri dans leurs hôtels, les moins riches évitaient de se promener dans les rues, et si cela advenait, s’attachaient à occuper le « haut du pavé » pour éviter les éclaboussures des petits égouts qu’étaient la plupart des rues. Le succès des « passages » parisiens qui se multiplièrent au XIX ème siècle tint à ce que, proprement dallés, ils permettaient d’éviter les fameuses mouches sur les bas blancs, ces traces de boue récoltées dans des rues mal pavées (ou pas du tout).

Paris a bien changé. On peut inventer un décor de films depuis le moyen âge jusqu’au milieu du XIX-ème siècle et laisser aller les acteurs et l’ensemble de la production sans qu’ils salissent leurs souliers ou leurs sneakers. Autrefois, certains quartiers ne pouvaient pas être fréquentés de nuit à peine de mort: le centre de Paris est aujourd’hui paisible et riche. La Seine a été si bien nettoyée que même les édiles parisiens, la mairesse en tête, songent à piquer une tête dans son eau devenue cristalline et pleine des poissons qui, il y a 3 siècles, faisaient encore la joie des gastronomes. Les filets d’eau puante ne courent plus au milieu des rues. Les saletés et ordures de la ville sont maintenant délicatement répandues contre les murs, restes de hot-dogs, seringues à but non médical, morceaux de portes et autres résidus plâtreux laissés par les rénovations d'appartement.

Au fond, non, finalement, Paris n'a pas trop changé, j’en veux pour preuve les bruits de la rue, toujours aussi intenses. Les hennissements des chevaux de traits ont été remplacés par les hurlements des motocyclettes et les explosions des moteurs de gros cubes ; les tonnes de crottin par le fumet des pots d’échappement. Les quartiers dangereux ne sont plus les mêmes mais ils sont tout aussi dangereux. Le couteau qui avait un temps été rangé dans les placards de cuisine a fait sa réapparition et sert avec autant de fréquence qu’autrefois. Les débats d’idées sont toujours là, la folie anarchiste a trouvé un remplacement de choix dans les hystéries religieuses. Un changement cependant : Le pinard ne fait plus recette, on va plus vite dans la défonce avec le crack et autres substances.

Il est de bon ton de nos jours de faire comme si les temps d’avant n’avaient pas existé. Rappelons pourtant que le Paris d’avant la guerre de 14, celui d’avant Haussmann, celui d’avant la révolution connaissait les fêtes les plus dingues. Au milieu de foules endiablées, dans les quartiers populaires, les "milords l’arsouille" menaient des bals de folie, que suivaient même les «Brummel» des beaux quartiers. On ne s’en souvient plus. Dommage, ils étaient plus sains que les mannequins sinistres et compassés des fashion weeks et que les influenceurs qui courent après les gros sous, entre strip-tease sur internet, propos orduriers et réclames pour botox.
 

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Il est dramatique de penser que le seul journaliste occidental que le tsar Russe a jugé utile de convoquer pour une "monoview" fasse partie de cette cohorte d’américains pour qui l’histoire humaine se réduit aux comptes-rendus des assemblées générales des Gafam, au déversement de propos complotistes sur X ou sur Facebook et aux grandes manifestations de l’Amérique profonde des red necks surarmés et sous-équipés en neurones.

Et finalement, cela n’a pas raté : lors du monologue infligé à l’Américain aux dents blanches et à l’allure constipée du monsieur qui veut montrer qu’on ne le prendra pas pour un minus, le président Russe, conscient de l’inculture de son interlocuteur et prêt à en tirer parti, a donné le sentiment qu’il lui infligeait une longue histoire de l’histoire russe depuis le célèbre Boris, à l’origine de tout, jusqu’au grand Poutine par qui tout recommence.

Il lui aurait fait comprendre quel grand dessein anime l’âme russe et avec quelle force elle a su élever les peuplades sibériennes sous-développées et contraindre les musulmans insolents. Il a su lui faire comprendre que la Russie était éternelle et que son Tsar tirait son nom des césars romains dont il était à la fois le continuateur et le rénovateur.  Il aura montré comme les Présidents américains ont été légers face à ses propositions de coopération, comme ils ont été arrogants vis-à-vis d’un pays qu’ils voulaient reconfigurer à la dimension de la Russie d’il y a trois cents ans.

Belliqueux ? Lui, le Tsar Poutine ? Lui qui a dû faire face aux agressions et aux intimidations de l’occident dégénéré. Ne lui a-t-il pas fallu mettre au pas les Tchétchènes qui continuaient le vilain boulot de la décomposition territoriale de la Russie « éternelle » ? La Russie ne s’est-elle pas opposée aux fantasmes nationalistes de la Géorgie en protégeant contre elle, l'alliée sans scrupule des occidentaux, les Ossètes et les Abkases ? Ne parlons pas des Russes dépossédés de leur russitude dans certains pays baltes et jusqu’aux confins de la Bulgarie et de la Roumanie.

Notre brave journaliste innocent de toutes ces manœuvres hostiles, ne savait-il pas que depuis le traité de Versailles (en connaissait-il l’existence ?) les nations occidentales se sont acharnées à découper, dépecer, déplacer des territoires et des populations entières. La Russie n’était pas dans le lot ? C’est oublier que ses pertes territoriales étaient dues aux communistes, complices objectifs de l’Occident. Les Russes, le Tsar Poutine n’a pas manqué pas de le rappeler, dénoncent ces menées spoliatrices et humiliantes qui ont valu à la Hongrie de perdre populations et territoires. Qui songe à la politique oppressive d’ « Ukrainisation » des Hongrois ukrainiens ? Qui songe au rattachement à la Pologne de populations typiquement russes ?

La volonté d’anéantir l’empire et ses valeurs a pris toute sa dimension insane lorsque au XIXème siècle, les Etats-Unis ont menacé d’envahir l’est sibérien et l’Alaska, sachant bien que le pouvoir russe n’aurait pu se défendre dans des territoires aussi éloignés. Le chantage américain a dépouillé injustement la Russie de l’Alaska et de ses populations traditionnellement russes et orthodoxes.

Victime des menées occidentales, la Russie entend redresser la tête, et redresser les torts, par la même occasion. A la Hongrie, elle rappelle ses droits, à la Roumanie, à la Bulgarie et à la Moldavie leurs obligations. Quant aux pays baltes, elle les invite à méditer sur leur existence et leur raison d’être.

Dans toute cette affaire, subliminale ou proclamée sur tous les toits, le reporter américain a quand même réussi à obtenir de la part du Tsar des messages de mansuétudes. Il n’en veut pas aux Ukrainiens, ce sont leurs dirigeants qui sont manipulés par les occidentaux. Il leur dit de considérer la belle harmonie qui règne entre la Russie et la Biélorussie. Voilà une belle leçon donnée à tous les dégénérés qui ne voient dans la division des peuples que de l’argent à gagner.

Il leur dit, et il le dit au journaliste américain dont le visage coincé parlait plus d’intestins dérangés que de partage d’idées supérieures : la Pologne et les pays Baltes, la Finlande aussi, n’ont rien à craindre de la Russie !

« читай по моим губам » *

a-t-il insisté.

*« Read my lips »


« Sit lux » ! et la lumière tremblota

 
 « Si on ne fait pas la grève, on n’aura pas de visibilité ». Cette phrase à elle seule renvoie bien loin dans l’histoire de France : « Si on ne coupe pas la tête du Roi, personne ne se rendra compte qu’on fait la Révolution ».

Qui pouvait être animé de cette raison raisonnante ? Les aiguilleurs des voies ferrées. Ils voulaient signaler comme la politique en matière d’aiguillage eit déficiente : le moyen ? Interpeller les députés ? Mobiliser le Sénat ? Lancer une alerte ? Non, définitivement ! Les aiguilleurs se trouveraient dépossédés ; quant aux alertes, le risque évident, serait de tomber dans le marigot du tout-venant des affaires sexistes, du pinard qui est sucré et de l’augmentation du taux de suicide chez les pédophiles.

Donc, il fallait faire grève à un moment fort, le moment où les Français partent en vacances. Ainsi, les aiguilleurs auraient « la visibilité ». Comme les contrôleurs de la SNCF qui ont réussi leur coup : 150 000 Français plongés dans les pires tracas. Pendant plus de 15 jours, tous les médias sur le pont et l’Ukraine renvoyée dans les pages des faits divers. De leur côté, les agriculteurs ont compris que ce n’est pas la capacité de bloquer qui importe, c'est celle de ne pas tout bloquer, mais suffisamment pour que ça se voit. Et comme le ridicule ne tue pas, les agents de la Tour Eiffel s’y sont mis : motif, les boulons se déboulonnent. Tant pis pour les touristes, tant mieux pour la visibilité !

« Visibilité » est le maître-mot. Oubliez les « prises d’otages », les « chantages aux vacances » ; oubliez tout ceci qui finalement n’a pour but que de dramatiser et de culpabiliser. Aujourd’hui, il faut être visible, et apparaître dans « un plateau-télé », dans « C dans l’air » ou dans le célèbre « Maizalors, keskifon ? » de Basil X.

Visibilité ? Est-ce vrai de tout, partout, sur tous les sujets ? Y aurait-il de l’invisibilité qui viendrait contredire cet appel fort à la visibilité ? Y aurait-il des domaines qu’on préférerait obscurs ? Des crimes qui ne serait que des fautes ? Pourtant, l’invisibilité est encore, de nos jours, une méthode bien rodée, tout spécialement dans le monde de ceux qui, contrôlant les médias, contrôlent le droit au visible ou à l’invisible.

N’est-il pas frappant que, dans ce moment où les menaces russes sur le monde occidental s’accompagnent d’angoisse et de craintes, certains faits « particuliers », russes parfois, à peine révélés disparaissent et vite retirés des regards sont rendus invisibles ? Un exemple : le patron emblématique de l’Express, Grumbach n’a été de toute son existence qu’un espion au profit de l’Union Soviétique. Après 50 ans de trahison, l’affaire vient d’être découverte. Il est légitime qu’elle soit rendue visible. Or, on peut craindre qu’elle retourne dans le monde obscur d’où elle vient. Pourquoi faire des excès de visibilité ? L’individu devait être un loup solitaire ? Le journal l’Express était « soviet proof ». Tout ceci était connu. Même Raymond Aron y écrivait ! Et les autres ? Couvertures ou complices ? Passez votre chemin, il n’y a rien à voir ! Ici, à ce moment, voir, c’est être voyeur !

Charles Hernu, ministre de la Défense de François Mitterrand, espionnait pour le compte de l’Union Soviétique depuis la fin de la seconde guerre mondiale ? Que sait-on des enquêtes lancées contre tous ceux qui ne pouvaient qu’être trop proches de son influence, de sa position, de ses relations.

Rien ? Pourtant, un homme comme ça, n’était-il pas bon d’être bien avec lui ? Sympathique et ouvert, il savait s’intéresser aux autres… Quand on a un ami de ce genre, de ce niveau, de cette importance, ne trouve-t-on pas un grand plaisir à travailler avec lui?

Beaucoup le disent : La visibilité serait comme lancer une chasse aux sorcières, pour que tout vienne à la surface. Comme les Américains, il y a près d’un siècle ? Frappons fort: pour les esprits forts,  pour les clercs de gauche, ceux qui écrivent si souvent dans l'Express, la visibilité c’est la censure sous un autre nom.

Les clercs auraient cessé de trahir* ? Ou continueraient-ils à fermer les yeux ?

*Julien Benda, La trahison des clercs

Ils sont enchanteurs les croassements des reinettes des bois

 

Dans une précédente humeur, j’avais insisté sur ce phénomène nouveau dans la vie sociale des sociétés modernes, spécialement dans les sociétés démocratiques: la dislocation de l’espace par la réduction de la liberté d’aller et de venir. On avait trouvé des phénomènes communs dans le domaine international entre les évènements de la mer Rouge, le blocage des voies de communication par les agriculteurs etc… Il faut maintenant aborder un sujet tout aussi délicat, tout aussi dangereux pour les sociétés démocratiques, tout aussi insensé au regard du développement économique des nations occidentales : la Zone à Désertifier. (ZAD).

Les remarques sur les atteintes à la liberté d’aller et venir avaient montré que la loi du plus fort, dans ces cas exemplaires, c’est la loi des minorités. Il n’est pas difficile d’empêcher les gens de se déplacer dans les sociétés qui insistent sur la paix sociale et le refus de la violence pour le règlement des conflits : il suffit de placer deux ou trois irréductibles à un carrefour sensible, ou de bloquer une voie d’autoroute avec une dizaine de tracteurs, ou bien encore, avec quelques copains, placer des madriers sur le parcours d’un TGV ou la piste de décollage d’un avion.

Retenez cet aspect essentiel : peu de gens, des petits groupes, peuvent bloquer le passage de milliers d’autres gens. Ils ne risquent rien. Dans les pays démocratiques, il n’est pas recommandé, ni conseillé de s’opposer vigoureusement aux petites minorités en « Kôlaire ». Il n’est pas possible à la multitude bafouée dans ses droits les plus élémentaires, ceux qui touchent à la liberté d’aller et de venir, de le faire savoir à ceux qui s’en moquent totalement.

On retrouve cet aspect dans les fameuses « Zones à Désertifier ». Le principe de ces zones est simplissime : ce sont des espaces plus ou moins grands (en fait, de plus en plus grands) dont l’occupation est interdite à toute entreprise quelle qu’en soit l’activité, la mission, ou l’objet social. Les raisons de l’interdiction sont claires : il ne peut être question de porter atteinte à l’espace disponible pour de futiles questions de créations de logement ou, pire, de zones industrielles. On ne doit pas non plus risquer de porter atteinte à des espèces animales qui pourraient se sentir menacées (Il est beau le brame de la biche, elle est sublime la démarche du loup en bandes la nuit autour des troupeaux de moutons, ils sont enchanteurs les croassements des reinettes des bois). Il est hors de question qu’on porte atteinte aux arbres, dont on sait qu’ils se sont vu reconnaitre une mission essentielle dans la captation (ou capture) du carbone… etc.

Sachant que la population des villes représente grossièrement, en France, 80% du total, sachant que la superficie urbaine représente 22% du territoire, on ne peut qu’en déduire que les défenseurs des « Zones à Désertifier » ont déjà récolté quelques beaux succès.

Certaines régions sont devenues le champ ouvert de leurs menées et montrent déjà ce qu’il faut en attendre. La région de Nantes est devenue le modèle de ce qu’il faut faire pour réussir une ZAD. La recette : ne pas être trop nombreux mais être déterminés. Ne pas se laisser impressionner par les votes démocratiques et mépriser cordialement l’opinion et les votations d’une population nécessairement aliénée et abrutie, opposée aux grandes idées des défenseurs de la ZAD. Profiter d’une ambiance démocratique locale. Par exemple, un socialisme « droit de l’hommiste » qui promeut le dialogue même à l’égard de ceux qui le méprisent et qui renonce à la force même à l’égard de ceux qui l’emploient sans vergogne. Il n’est pas mauvais de se souvenir que le maire de la bonne ville de Nantes a été un des artisans et un acteur du socialisme mou « hollandais ».

Les résultats sont là en faveur des défenseurs de la Zone à Désertifier. Les implantations d’usine ont chuté, les projets industriels ont été abandonnés, l’extension de l’aéroport oubliée. Progressivement, la ville de Nantes devient une espèce de camp de cantonnement (avant qu’on utilise une autre expression) pour populations urbaines amorties.

Il faut prévoir dans les prochaines années que la population ne sera plus autorisée à se promener dans la ZAD pour que zones humides et zones sèches demeurent vierges de toute présence des nuisibles que sont les populations urbaines. Les défenseurs de la ZAD Loire atlantique auront le monopole des promenades éducatives. La population de Nantes et de ses alentours sera strictement parquée en sorte que la « sauvagitude » des animaux et des végétaux soit préservée.

Les ZAD se multipliant, la population française, enfermée dans des ZUT (zones urbaines tristes) se verra dicter les conditions d’aller et venir dans les déserts verts alentour, animés ici et là par une délicate agriculture artisanale d’auto-suffisance. Les ZAD seront gardées par leurs fameux défenseurs, cette minorité cool qui aura su dompter la démocratie et ses libertés au bénéfice des bêtes, des arbres et des grenouille arboricoles.

Le déclin de l’Occident a beaucoup d’avenir (O.Spengler)

 
On sait que Jean Giraudoux avait fait le décompte de la célèbre histoire où Zeus, se fait Amphitryon pour pouvoir épouser Alcmène. Il en avait identifié 38. J’ai eu du mal à résister. Un moment j’ai pensé intituler cette humeur : occidenticide 398. A la différence de la numérotation d’amphitryon, le nombre 398 ne ressort d’aucune recherche. J’ai présumé simplement que depuis que l’Occident est Occident, l’idée de l’occire lui est congruent : les uns le trucident, le ridiculisent, le veulent petit, d’autres le veulent veule, arrogant, barbare, insuffisant, tueur de dieux, massacreur de population sans défense… Je pense que je n’ai pas vu un livre, un essai, un article qui disent combien il faut se réjouir d’avoir « un » Occident, ni à quel point être occidental est un privilège qu’on aimerait partager avec d’autres. Hélas, tout ceux-là que nous voudrions convaincre sont en Orient !

Pourquoi ratiociner sur « Occident » ? Pourquoi s’étonner que le nombre d’ouvrages négatifs sur l’Occident excède aussi cruellement le nombre d’ouvrages positifs ? Pourquoi ne lit-on pas des propos qui auraient pour titre : « la gloire de l’Occident », ou, « le triomphe de l’Occident universel » etc. Et aussi, finalement, pourquoi, l’Occident a-t-il tant d’ennemis ? Ne pourrait-on pas s’attacher à haïr d’autres parties de l’univers plutôt que de se fixer sur celle-ci tout particulièrement.

La réponse traditionnelle est simple et universelle : les autres sont jaloux.

En soi, ce n’est pas très grave. C’est même naturel. Pensez à cette récente découverte d’ethnologie préhistorique : les chasseurs cueilleurs du Danemark, installés dans des temps reculés, depuis des temps encore plus antiques, auraient disparu, au moment où des peuples agriculteurs seraient arrivés. Il semble bien que les premiers aient été purement et simplement liquidés par les seconds. Une histoire de jalousie dès l’aube de l’humanité.

Donc, que continuent à sévir les auteurs décrivant la lente (trop lente) agonie de l’Occident me parait très humain (trop ?). Les occidentaux eux-mêmes s’y sont mis (on pense à Prévert : la chasse à l’enfant, « même les braves gens s’y sont mis »). En France, il y a eu de drôles de tentatives d’occidenticide. Grâce aux frasques du Grand Condé, l’ennemi intérieur est devenu un personnage permanent de notre société. Récemment, on a vu le ministre de la Défense du Président Mitterrand, Hernu, passer les informations les plus confidentielles aux plus farouches ennemis de l’Occident et donc de la France. Plus récemment encore, on a découvert que la presse française était infestée, d’anti-occidentaux (et d’anti-français, par voie de conséquence). Personne ne croira que Philippe Grumbach, le patron de l’express a fait l’espion tout seul, pendant près de 50 ans. Un homme de cette envergure et de cette réputation intellectuelle ne pouvait pas être un loup solitaire. Ne trouvait-on_pas des propos occidenticides dans l’Express sous diverses plumes ainsi de ceux-ci : « Depuis le Covid, nous savons que le mensonge d'Etat règne en France ».

« Or, cosaque, c'est Kazakh c'est le monde de la steppe !», c’est le même auteur, Emmanuel Todd qui balance ce type d’information vaseuse et les accumule dans un ouvrage, à vocation Occidenticide : « La défaite de l’Occident ». Voici un anthropologue qui sait dire que l’Occident s’effondre et que la Russie moderne s’érige en un Etat solide car : « Le système Poutine est stable parce qu'il est le produit de l'histoire de la Russie et non l'homme l'œuvre d'un homme ».

Emmanuel Todd, un espion comme Grumbach ? Est-il un homme de science, comme l’autre était un homme de presse ! Ses propos sont transparents, et même il a fait appel aux sources les plus puissantes de la pensée française en mobilisant le célèbre ouvrage d’Anatole Leroy-Beaulieu « L'Empire des Tsars et les Russes » publié en 1881 pour comprendre la structure du pouvoir et des institutions du Président Poutine. (De même, on sait que la compréhension de la présidence d’Emmanuel Macron doit beaucoup à l’Histoire du Consulat et de l’Empire d’Adolphe Thiers publiée en 1845).

Scientifique, notre occidentophobe français, le montre par l’utilisation intensive de concepts de son cru : famille nucléaire, institutions zombies et autres finesses ou l’approximation est instaurée en mode de pensée. Entre autres exemples « la renaissance italienne et le protestantisme allemand : notre modernité est éclose en zone autoritaire ». Pour défaire un monde, tous les arguments sont possibles. Quitte à passer pour un Levy-strauss de sous-préfecture.

En fait d’occidenticide, Emmanuel Todd, a exclu la France de sa réflexion sur la « décadence de l’Occident »: s’agissait-il de ne pas trop afficher ses amitiés Poutiniennes ? Ou plus simplement, ne devrait-on pas en conclure que c’est fini pour la France. Plus aucun intérêt. Emmanuel Todd ne pourra même pas postuler pour un job d’assistant Espion !

 
 


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