Magnifiques photos, trop peu nombreuses ?
Oui, certainement, mais passionnantes, donc on pardonnera le petit nombre et on vantera la créativité de celles qui sont présentées.
J'avais eu, il y a quelques mois, le plaisir de visiter l'exposition des œuvres de Marina Black, dans la même galerie.
J'avais fait un commentaire qu'on peut lire en suivant ce lien.
Marina Black fait partie des chercheurs-fouilleurs de l’âme et des artistes qui n’acceptent pas que la photo soit une image sur un plan. Elle s’efforce d’introduire le temps, la différence, la complexité… Introduire ? Ce n’est pas le bon terme. Elle retrouve malgré les limites d’un plan bidimensionnel, vie, pensée, sentiments.
Ce sont autant de dimensions temporelles ou physiques, épaisseurs donc déchirures, superpositions donc déroulement du temps, effacement de la lumière donc béances et plongée dans l’obscur.
Tout en discutant de la qualité de son travail, je me suis livré, ce qu’il ne faut jamais faire lorsqu’on commente le travail d’un artiste, au jeu des comparaisons. Sans réfléchir très longtemps, c’est à Witkin que j’ai pensé en premier. J’avais déjà tenté cette comparaison. J’y tiens finalement. Bien sûr, aucun rapport dans la mise en œuvre, en place et en scène des sujets. Rien à voir entre le montreur du monde et de ses vanités qu’est Witkin et, Marina, qui s'attache aux pensées et aux sentiments. Quoique… Marina Black a des photos aussi lucides que celles de Witkins, la violence et l’outrance en moins.
Cette comparaison, je la nourris, de certaines nuances de gris, certains dédoublements d’images et de décors, comme si, au-delà de l’extrême précision de Witkins et des décrochements subtils de Marina Black, se trouvait l’expression d’un refus ou d’une difficulté à figer le temps et les mouvements qui le supportent.
La photographe est aussi dans une complicité évidente avec D’Agata et Michener, pour dire le corps et, à la fois, ses enthousiasmes et ses fêlures.
Il faut aller voir les photos de Marina Black, chez Vu.
Une fois n’est pas coutume : je suis contraint à critiquer et à conseiller de ne pas se déplacer pour un film et une exposition.
Le film, tout d’abord. « Une femme d’exception ». Le sujet n’était peut-être pas facile à traiter. La preuve : il n’est pas traité. La femme d’exception réelle, Ruth Bader Ginsburg, Juge assesseur de la Cour suprême des États-Unis, est vraiment exceptionnelle. Son incarnation au cinéma est d’une banalité à mourir d’ennui.
De nombreux films ont exalté le courage féminin, les femmes combattantes, les causes « des femmes », celui-là est d’une platitude qui dessert la cause qu’il prétend illustrer.
Conclusion : si vous avez une femme d’exception, ce film ne vous apprendra rien, si vous en cherchez une, évitez le film, il vous induira en erreur.
Lui aussi exposé au Petit Palais, il ne mérite pas autant d’opprobre… quoique. Qui est ce Monsieur ? Un Français des lumières. Il a vécu exactement entre l’Ancien Régime et les années post-révolutionnaires. Il se voulait architecte moderniste, post-post néo-classique, quoique parfois, pré-syncrétiste. Il a proposé des dizaines de projets de théâtre, d’opéra, d’hôtels particuliers qui n’ont jamais été construits. Il a collaboré marginalement avec quelques grands architectes mais n’a jamais su s’imposer. Il est resté un petit fonctionnaire dessinant le soir en rentrant chez lui. Dessins d’architectures, dessins de décorations, de serrureries, dessins industriels, de bâtiments utilitaires…. Mais il a été un suiveur de Ledoux et de Boullée. Il a donné dans les figures à la Messerschmidt.
Oublions ses œuvres érotiques… bien qu’elles soient souvent reprises dans les illustrations modernes : son travail lisse et poli leur donne un fini qui fait propre.
Ce qui sauve cette exposition-là : voilà un homme qui avait une exceptionnelle technique de dessinateur. Si on aime le dessin, on ne perdra pas son temps.
Etonnante Paula Rego. L’affiche de l’exposition met en scène des danseurs. Un tango ? Une valse triste ? Beautés lourdes emportées en une danse immobile, n’étaient les robes qui virevoltent pesamment, comme lestées de plomb. Pas de sexe là-dedans, les visages sont tristes et massifs. Les corps caparaçonnés dans des vêtements qui font office de corsets et d’armures. Les jambes lourdes n’annoncent pas des élégantes citadines, elles font office de colonnes et proportionnées à une lourde tâche, porter du plomb et de la pierre ! Une scène qu’on pourrait dire paysanne ? Mais non, nous sommes sur une piste de danse et non pas sur la place d’un village où dévalerait les danseurs de bourrée de Breughels.
Le temps de la danse est figé. Les temps de la peinture de Paula Rego est figé, gelé, suspendu à l’instar de ce temps qui n’arrive pas à se faire danse.
Tout au long de l’exposition, viennent les uns après les autres, s’interposer, s’immiscer dans l’esprit des regardeurs, quelques artistes connus ou moins connus, disparus ou encore bien vivants. Le premier qui s’impose c’est Balthus et sa façon d’immobiliser ses sujets dans des mouvements esquissés mais non achevés ou des situations qui appellent plus l’esprit que le regard. La peinture de Paula Rego bloque le regardeur et lui intime de ne plus bouger. S’il doit y avoir mouvement c’est dans sa tête qu’il doit se déployer et non dans une fiction picturale.
Mais à l’inverse de Balthus, les personnages de Paula Rego, devrait tirer leur propension à l’immobilité de la lourdeur de leurs silhouettes, à la fois sculpturales et graves. Dans le tableau intitulé, « la fille du policier », le mouvement qui se forme est interrompu, comme on peut le dire d’une photographie instantanée, et fixé. La fenêtre d’où vient la lumière contribue à cette suspension du temps en tranchant dans le mur, en exposant une lumière bleue, qui parle de la nuit qui vient. Comme dans l’œuvre de Balthus, un chat, est là qui ne parvient pas à échapper aux pesanteurs qui annihilent temps et mouvement.
On trouverait ce même thème des corps massifs et entravés, dans la « proie » : deux petites filles agenouillées qui paraissent statufiées.
Ici, il faut parler d’une science de la composition qui est remarquable et implacable. Pas de faute de conception. Economie de moyens impeccable. Il est des moments où on se souvient de l’économie des moyens d’un Hopper ou d’un Magritte, deux peintres qui ont aboli le temps dans leurs œuvres.
Il est temps de rappeler que l’œuvre entière de Paula Rego tire son inspiration des contes cruels pour la jeunesse. Les thèmes sont donc sombres et l’enfance s’y trouve à la fois bien malmenée et aussi, très souvent, cruelle.
J’ai trouvé là, une parenté étroite avec un dessinateur et un photographe : le premier est Zonder dont les personnages sont frères ou cousins des personnages de Paula Rego, les enfants en particulier que des déformations de proportions corporelles rendent étonnants, inquiétants, dangereux et aussi Witkin, le photographe de la violence rituelle ou fantasmée.
L’un et l’autre chroniqués dans ce site :
Chaque tableau est un défi à l’imagination, une menace aussi car, tout ceci pourrait bien être vrai.
Goya n’est pas loin, et Garrouste dont les personnages subissent humiliations et transfigurations.
C’est une très belle exposition et dérangeante.
L’exposition, ensuite. Au petit Palais. Fernand Khnopff. En exergue de l’exposition on cite un critique qui insistait sur l’excès de consonnes dans le nom de cet artiste belge !!! C’est peut-être ce qu’il faut retirer d’une exposition méritoire : l’individu est connu, il a une réputation, les portraits de sa sœur en pied ou non, modèle préféré, sont repris sans cesse pour illustrer un peu n’importe quoi. Même chose pour son « Sphinx et Œdipe ». Il fait frémir l’épiderme des critiques en recherche de suggestions érotiques et de perversions modérées. C’est tout.
Il a fait, en beaucoup moins bien, comme les préraphaélites anglais, des tableaux bourrés d’androgynes (c’est commode car cela évite de s’embêter avec les histoires de féminin/masculin). En quelque sorte, il a fait de la peinture inclusive. Surtout, il n’a pas cessé de pomper ses contemporains, Odilon Redon, Gustave Moreau, Rossetti, Burne-Jones, un peu Gustave Doré. Il est des peintres qui ne se sont pas souciés de multiplier les représentations féminines, cf Henner, mais ils le compensaient par le charme de leurs œuvres.
Khnopff balance ses bonnes femmes vaguement écossaises (ou anglaises) en usant d’une imagerie primaire (le menton en galoche, le teint blafard, les cheveux roux, le regard absent) et n’en change jamais. Il y a sûrement une dominante psychanalytique. Des experts du genre ont certainement étudié son cas. Comme le Petit Palais n’est pas un lieu destiné au traitement des cas de névroses, psychoses et toutes ces choses, revenons à l’art:
Ennuyeux et totalement inintéressant.
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