La Vertu change trop vite
Il faut relire ce que j’écrivais, il y a un an sur la rue des Vertus. Et il faut voir ce que les vertus sont devenus. Pour les soutenir, on leur a mis des étais et on entend une voix sombre lancer une sombre question : Paris s’effondre-t-il ?
J'avais mis sur ce site de belles photos montrant une charmante petite rue parisienne. Elle n'était pas extraordinaire, cette rue! Elle n'avait ni grands portails, ni sculptures pour la mettre en valeur. Elle n'avait que le doux charme des petites rues du centre de Paris. Revenant sur les lieux et recherchant ma rue des Vertus, voilà que je découvrais qu'elle avait disparu.
On sait qu'il est arrivé à Paris que des rues disparaissent. On sait qu'en restructurant leur quartier, des rues ont été oubliées, délaissées, détruites. Mais la rue des Vertus! cela aurait été inimaginable. Impensable.
En fait, elle n'avait pas disparu mais elle avait été quasiment obstruée.
Des étais gigantesques avaient été posés au tout début de son croisement avec la rue des Gravilliers afin de soutenir un immeuble en danger de s'effondrer.
Les vertus seraient donc menacées à Paris? Elles s'effondreraient? Les étais mis en place nous diraient-ils que les temps sont graves et que "cautère sur jambe de bois", ils sont là pour parer au pire. Mais ils ne pourront rien réparer.
J'ai pris quelques photos.
Vous pourrez voir que les vertus sont en bien mauvaises postures.
Rue des Vertus (75003)
Elle débute Rue des Gravilliers et finit rue Réaumur.
Transport: stations de métro Arts et Métiers et Temple.
Il faut que je vous avoue une chose que seul un parisien de très longue date peut avouer : j’aime arpenter la rue des Vertus. Je trouve ça rassurant. Je me sens meilleur. Il y aurait une sorte d’aura dans cette rue, des radiations ou un parfum particuliers qui vous feraient devenir bon, généreux, altruiste, compassionnel … tout ce qu’on n’est pas naturellement.
J’aime l’arpenter pour me pénétrer des Vertus de cette rue. Elle en a nécessairement beaucoup puisqu’elle est la rue des Vertus. L’effort n’est pas immense. Arpenter ne renvoie pas une promenade très longue, ici, précisément, la rue des Vertus mesure 2 arpents traditionnels, (sachant qu’un arpent accordé avec 200 pieds de Roi vaut approximativement 70 mètres). La rue des Vertus, on le déduit facilement, ne mesure pas plus de 150 mètres.
Rue de petite taille, elle l’est non seulement par sa brièveté mais aussi par son étroitesse. Elle varie selon l’endroit où on prend ses mesures de 5 à 8 mètres. Autant dire que l’automobiliste et surtout le camionneur doivent bien calculer leur trajectoire. Autant dire aussi que le piéton ne doit pas s’attendre à de larges trottoirs protecteurs. Il devra, par endroit, se contenter de 15 ou 20 centimètres !
C’est aussi une des raisons pour lesquelles j’aime la rue des Vertus. Chaque fois que je la croise sur mon chemin, elle me fait venir de drôles de pensées sur l’humanité. Je m’interroge. Je me demande par quelle inconscience, légèreté ou désinvolture on a pu affubler ce petit bout de rue du beau nom de « Vertu ». La vertu pour un parisien se présenterait sous l’espèce d’un passage étroit, bordé de façades plus ou moins aveugles, dangereux pour celui qui s’y promène et à l’écart de toute lumière naturelle. Elle est si étroite et si mal orientée que les rayons du soleil ont bien de peine à s’y frayer un chemin. La rue des Vertus, le soir tombé ou en hiver quand la nuit vient très tôt, ressemble à ce qu’on nommait dans le Paris d’autrefois, un coupe-gorge. Rendez-vous compte qu’elle est plus sinistre et inquiétante que la rue Vide-Gousset !
Mais venons-en aux faits et à l’histoire de cette rue : la rue des Vertus (IIIe arrondissement) était déjà connue en 1546. Elle appartient à un des plus vieux quartiers de Paris, le Marais, aujourd’hui quartier des « Arts et métiers » qui est une partie du 3e arrondissement.
Pourquoi se nomme-t-elle rue des Vertus ? En 1775, un auteur du nom de Jaillot affirme n’avoir pu trouver « aucunes lumières sur l'origine ni sur l'étymologie du nom de cette rue ». Un peu plus tard, il semble possible que son nom renvoie aux trois vertus de la théologie chrétienne. Celles qui s’imposent aux hommes fidèles à Dieu, c'est-à-dire la foi, l'espérance et la charité (ne pas confondre avec les vertus cardinales : prudence, tempérance, force et justice. Les premières ont trait à Dieu, les secondes aux hommes entre eux).
Faut-il penser à sa proximité par rapport à un établissement religieux nommé Notre Dame des Vertus ? On pourrait d’autant plus l’imaginer que la barrière qui séparait alors cette partie de Paris des villages alentours était nommée la « barrière des Vertus ».
A peine a-t-on pensé au bon, au beau et au bien, que viennent s’interposer les idées égrillardes et les « petites vertus » et on s’en va en chantonnant avec Offenbach dans sa célèbre opérette « La belle Hélène » : « Dis-moi, Vénus, quel plaisir trouve-tu à faire ainsi cascader la vertu ».
D’autres auteurs, Félix et Louis Lazare, ont proposé que le nom de la rue, loin de prendre sa source dans les vertus théologales ou cardinales, lui venait de la présence de femmes «qui ne faisaient pas profession de vertus bien farouches». Ce serait donc plutôt une rue des «Petites Vertus», c’est-à-dire de la débauche, qu’une rue des grandes vertus, celles qui vous conduisent à Dieu.
Les immeubles qui bordent la rue ont été longtemps des «hôtels saisonniers», où venait loger une main d’œuvre louant ses services aux artisans dont le quartier était très largement doté. On y trouvait donc des gens de toutes origines, depuis des saisonniers français, quittant leurs campagnes pour aller à la capitale vendre leurs bras et leurs compétences dans le bâtiment, la serrurerie, la bagagerie, et on y trouvait même des Chinois venus s’installer en France.
La rue est resté pratiquement inchangée depuis le XVIIème siècle, hormis quelques constructions publiques de la fin du XIXème siècle et un immeuble plus récent. On ne trouve, dans la rue des Vertus aucun des hôtels particuliers élégants du Marais mais des immeubles à structure en bois et en torchis, pisés ou moellons sous enduit. Ils se maintiennent comme ils peuvent, s’affaissant, se tassant et prenant l’aspect traditionnel des très vieux bâtiments de Paris : quand ils ne paraissent pas s’effondrer sur le côté, ils donnent le sentiment d’avoir pris du ventre avec l’âge.
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