https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-bitcoin-en-rca-potion-magique-ou-illusion-economique-1404270
Et de deux ! La Centrafrique, suivant la déclaration de la présidence de la République Centrafricaine, « a adopté le bitcoin comme monnaie officielle au côté du franc CFA et légalisé l'usage des cryptomonnaies ». Ainsi, la RCA deuxième pays le moins développé du monde selon l'ONU devient le deuxième pays au monde à avoir fait ce choix et le premier pays à le faire en Afrique.
Rappelons en effet que le 7 septembre 2021, le Salvador avait été le premier pays au monde à adopter le bitcoin comme monnaie légale. Cette prise de position originale et « en rupture » ne lui avait pas valu les félicitations du FMI qui y avait vu une décision dangereuse pour la « stabilité financière, l'intégrité financière et la protection des consommateurs ».
En République Centrafricaine, le choix de faire du bitcoin une monnaie légale a été voté par L'Assemblée nationale « à l’unanimité » des députés. Les commentaires politiques qui ont accompagné ce vote sont dithyrambiques : il « place la République centrafricaine sur la carte des plus courageux et visionnaires pays au monde ». Ce vote ouvrira de « nouvelles opportunités » pour sortir la Centrafrique de la pauvreté.
Sur le plan technique, on notera que l'adoption des cryptomonnaies comme mode de paiement ne concerne pas seulement le commerce, on pourra en effet assurer via le bitcoin le règlement des contributions fiscales. Ces opérations « hors banques » passeront par des plateformes autorisées.
Un fonds de 150 millions de dollars sera mis en place pour faciliter la conversion automatique de la devise en dollars. Plus de 200 distributeurs automatiques permettront d’échanger des Bitcoins. Une application facilitera les virements et les paiements en crypto. Pour stimuler l’implantation de la nouvelle monnaie, la loi prévoit aussi que « les échanges en cryptomonnaies ne sont pas soumis à l'impôt ».
On peut dire que les fées se sont succédé sur le berceau de la nouvelle monnaie légale de la Centrafrique qui viendra s’ajouter au franc CFA et aux devises classiques. On n’insistera pas sur le fait qu’une monnaie cryptée suppose, pour que son usage ne soit pas illusoire, que les utilisateurs aient accès à internet, ce qui n’est pas la cas de la très grande majorité des citoyens de la Centrafrique (la pénétration d’internet ne dépasse pas 11% de la population).
Il vaut d’être noté que selon les promoteurs de cette initiative : l'envoi et la réception d'argent avec la République Centrafricaine seront enfin facilités et éviteront le cadre contraignant de la Banque centrale. C’est connu, le bitcoin comme l’ensemble des monnaies cryptées met au rencart les vieux tiers de confiance et les contraintes indues qu’ils font peser sur les agents économiques. Enfin, pour reprendre une pétition de principe devenue célèbre : On rendra la monnaie aux citoyens.
Avant de commenter l’initiative centrafricaine, il est intéressant de résumer le bilan de l’expérience salvadorienne. Argument fort : le PIB de l’année dernière a rebondi de 10%, tiré en avant par une reprise très forte de l’activité touristique « post-pandémie ». Argument faible : le bitcoin s’étant effondré contre les devises traditionnelles les réserves du Salvador ont suivi et fait fondre de plus de 22 millions de dollars les réserves du Trésor du pays. Le Salvador a connu des manifestations violentes contre le bitcoin qui n’est pas devenu la devise miracle que son gouvernement avait annoncé. Donc résultat d’autant plus mitigé que les grands prêteurs dont le FMI, ont nettement marqué leur opposition.
Est-ce à dire que les instances financières et monétaires internationales vont, devant la décision de la Centrafrique, exprimer leur désaccord dans les mêmes conditions.
Ce n’est pas certain pour plusieurs raisons : Les institutions internationales se préoccupent des freins à la croissance de l’Afrique que constitue l’insuffisance de l’offre bancaire traditionnelle (qu’elle soit publique ou privée). En ce sens, le FMI, imagine que les cryptomonnaies pourraient « contribuer à un système de paiement plus robuste » sur le continent africain. De fait, les banques centrales de l’Afrique de l’Ouest réunies autour de la BCEAO ont lancé des études approfondies sur la mise en place d’une monnaie numérique de banque centrale (CBDC : central bank digital currency) dans la foulée des avancées tant chinoises sur le renminbi numérique qu’européennes, en suède par exemple.
Au cours d’une conférence de presse suivant la décision de la Centrafrique, le directeur du département Afrique du FMI, Abebe Aemro Selassie a déclaré « Dans l’hypothèse d’un mouvement bien préparé vers la numérisation et par le biais de l’utilisation des monnaies numériques des banques centrales », les cryptomonnaies « peuvent contribuer à un système de paiement plus robuste » sur le continent, a indiqué.
Entre ce constat et l’adoption du bitcoin comme monnaie légale, il y a un gouffre ! qu’un pays d’une taille très modeste ouvre toute grande la porte de son économie aux acteurs et plateformes du bitcoin, à son anonymat, à ses « baleines » en assortissant cette ouverture d’avantages fiscaux considérables n’est pas rassurant. La maîtrise technologique de cette ouverture ne pourra pas être assurée localement, le suivi des opérations ne disposera ni des budgets, ni des personnels, ni des ressources technologiques indispensables. On reprendra les observations faites plus haut par les représentants du FMI « adopter simplement la possibilité d’utiliser le bitcoin est quelque chose qui doit être surveillé de manière très, très attentive, a-t-il poursuivi. Il faut s’assurer que le cadre législatif, la transparence financière et la gouvernance sont bien en place. »
Ce thème est constant dans la réflexion menée par la BCEAO par exemple. Il est central et incontournable.
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