in "Critéres esthétiques et jugement de goût"
Hachette littérature, collection pluriel
11 C'est un trait caractéristique de notre époque que la diffusion de l'expertise y aille de pair avec un savoir accru et un relativisme lui aussi accru.
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7 La majeure partie de la production artistique est dépourvue de valeur esthétique et n’en constitue pas moins de l’art.
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7 On pourrait dire de l’art en général ce que Stanley Donen disait du cinéma et de l’amour « même quand ce n’est pas bien, c’est encore bien »
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12 Les philosophes oublient trop que l’art n’est pas seulement quelque chose qui se contemple mais quelque chose aussi qui se pratique, que ce soit dans des pratiques amateurs, professionnelles ou cultivées.
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28 Le concept d’un art sans définition est devenu le point central de sa définition. Ceux qui dénoncent le bazar de l’art contemporain comme ceux qui l’exposent ou le commercialisent utilisent tous la notion d’art contemporain pour unifier cette disparité dont ils s’indigent ou dont au contraire ils profitent.
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36 L’art sous toutes les formes qu’il prend est une activité codifiée dont le code est continuellement en cours d’élaboration – c’est un processus. Devenir un artiste, c’est apprendre à opérer selon ces ensembles de règles et à élaborer sur elles.
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37 Duchamp prétendait que ce sont les regardeurs qui font les tableaux ; c’est en fait le couple artiste-regardeur qui fait les œuvres, readymades compris.
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40 Si nous avons aujourd’hui, chacun, le goût que nous avons, ce n’est pas qu’il soit inné, spontané ou naturel, c’es que , bon ou mauvais, il est le résultat d’un apprentissage et d’une mise ne forme à parti des jeux de langage de l’évaluation qui sont aussi des jeux de langage de la perception et du sentir.
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41 D’une part, pourquoi n’admettrait-on pas que l’expérience esthétique, dans sa prétendue unité, est constituée en fait d’une famille d’expériences qui ont, elles aussi, entre elles des ressemblances de famille…. Pourquoi faudrait-il que l’expérience de la contemplation d’une peinture de Matisse soit la même que celle d’un monochrome de Ryman ?
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41 N’y aurait-il pas un noyau hylétique commun aux expériences esthétiques, un caractère esthétique commun à tous les vécus d’expérience esthétique.
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45 Les affects dans toute leur complexité s’apprennent et se parlent. … les savants traités des passions ….étaient moins des livres de science que des grammaires de l’apprentissage et de l’usage passionnel
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46 De la même façon que … les traités d’esthétique, les traités techniques, les « salons » et revues critiques sont des grammaires de l’apprentissage aussi bien artistique pour les artistes qu’esthétique pour ceux qui reçoivent leurs œuvres.
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46 Dans son essais sur la norme du goût, Hume cite un passage de Don Quichotte où deux experts jugent le vin dans une barrique. L’un lui trouvait un léger goût de fer alors que l’autre lui trouvait un léger goût de cuir. Une fois vidée la barrique, on découvrit au fond une clef avec une lanière ne cuir.
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51 Constater qu’il n’y a plus de Critères esthétiques revient à dire qu’on n’a plus les moyens de faire des distinctions. D’où le thème corrélatif que l’art contemporain c’est « n’importe quoi »- un grand bazar, un souk, un supermarché… retrouver des critères signifierait, en revanche, disposer à nouveau de catégories pour faire des distinctions et marquer des différences.
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53 La diversité des œuvres et la disparité des expériences qu’elles suscitent en sont devenues à constituer la définition paradoxale d’un art « dé-défini »…
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53 Même les experts aux goûts les plus raffinés aiment les chansonnettes ou les brins d’herbe agités par le vent…il y a quelque chose de très profondément « esthétique « dans cette diversité d’expériences en ce simple sens qu’elle nous font… quelque chose d’esthétique.
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55 Il faudrait un jour enfin reconnaitre la part de mauvaise foi tenace et sincère qui est au cœur de nos jugements les plus catégoriques et de nos certitudes les plus péremptoires, cette part de fanfaronnade et d’aveuglement voulu : qui fausse jusqu’à nos problématiques les plus sérieuses – et dans tous des domaines.
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59 Tout homme a, anthropologiquement, des expériences esthétiques, quel qu’en soit le niveau, le raffinement supposé, l’apparente pauvreté, … Si nous ne posions pas ce principe, nous devrions admettre à l’inverse que seuls certains hommes ont des expériences esthétiques – qui seraient, comme par enchantement, élevées.
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68 L’énoncé du jugement esthétique est à la fois personnel et inscrit dans un jeu de langage partagé.
« Imaginer un langage signifie imaginer une forme de vie » (Wittgenstein)
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73 …. Le jugement va se développer, s’amplifier, se complexifier et se normer au sein des jeux de langage particuliers et locaux : celui de l’esthétique du cheval espagnol, de l’esthétique du rap, de l’esthétique académique de l’épure…
L’entrée dans le jeu de langage a tout de la singerie pure et simple, de la reprise de clichés et de manières toutes faites de parler…. Wittgenstein : « un enfant utilise de telles formes primitives de langage quand il apprend à parler. Ici l’enseignement n’est pas une explication mais un dressage. …c’est ainsi que s’élaborent les critères.
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74 … qu’ils se rassurent, il y a toujours des critères, mais il y en a même beaucoup-certains diront « trop ». Leur profusion n’est pas signe de dé-différenciation (le règne du n’importe quoi…) mais plutôt d’une extrême différenciation des jeux de langage et des appréciations esthétiques – et le signe d’une extrême différenciation sociale aussi.
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83 Ce qui, du coup, place la notion de jugement à la base de notre connaissance, une connaissance qui consiste à appliquer les concepts d’un langage aux choses du monde ;
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84 Wittgenstein dit à plusieurs reprises que l’appréciation esthétique au sein d’un jeu de langage demande la description de toute une culture dans sa complexité…. Ce que nous appelons actuellement le goût n’existait peut-être pas au moyen âge. On joue des jeux totalement différents aux différents âges de l’histoire.
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85 Ce qui expliquerait probablement que parfois, lorsque nous nous mettons à discuter de la nos appréciations, puissent se produire les plus violentes et irrémédiables ruptures – parce que nos appréciations esthétiques plongent alors leurs racines jusqu’aux ramifications profondes de nos formes de vie et de culture et touchent ainsi à nos modes d’entente les plus vitaux : nous nous apercevons alors que tel point de « détail » esthétique révèle une incompatibilité complète des formes de vie.
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87 …savoir si une telle entente des sensibilités est vraiment à ranger parmi les ententes humaines fondamentales au sens strict, pour ne pas dire transcendantales, c'est-à-dire parmi ces ententes dans lesquelles il n’y aurait ni monde ni monde humain, sans lesquelles le monde serait littéralement dévasté.
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92 Les impérialismes esthétiques, pour être plus doux et plus insidieux que les impérialismes tout court, n’en sont pas moins des phénomènes de domination. Si la culture du XXème siècle aura été américaine, si nos critères d’évaluation et de perception auront tellement été marqués par ceux de l’expressionisme abstrait, du pop art…. c’est peut-être moins affaire d’ontologie de l’œuvre d’art que de domination d’une production culturelle. …
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92 C’est bien la montée du pluralisme à la fois géographique (entre les cultures) et social (au sein des cultures) qui, aujourd’hui dérangent ceux qui parlent de crise des critères et courent après leur prétendue vérité. Le postmodernisme, c’est d’abord le temps du post colonialisme.
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93 Il ne faut pas surestimer les convergences : …La Joconde, tout le monde y voit un chef d’œuvre mais personne pour les mêmes raisons.
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94 Il y a effectivement des critères esthétiques. Dans le principe, ils sont toujours locaux et relatifs.
… si on cherche des critères absolus et universels : qu’on se rassure on n’en trouvera pas.
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97 Lorsqu’il n’y a plus de canons reconnus du jugement esthétique- quelque soient ces canons- on en vient ou revient à une esthétique du goût…
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108 L’art s’apprend dans tous les sens du terme, on apprend à en produire, on apprend à le goûter.
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109 Le critique qui veut apprécier un discours antique doit être conscient des conditions de sa production et des intentions de sont auteur : il lui faut se placer dans les circonstances que la performance de l’œuvre suppose.
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