- Yves Sarrans: Grains de rêves
- Francesca Piqueras: une morne moitié
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Dans le titre de son œuvre monumentale, Peter Klasen fait allusion à « Bonjour Monsieur Courbet », tableau peint en 1854 par Gustave Courbet. Le pont de Bayonne de Gustave Eiffel a été construit en 1864.
150 ans plus tard, Peter Klasen est pressenti et présenté par le critique d’art Alin Avila, et Fan Zhe directeur artistique de P’Art sino-français pour la commande d’une sculpture monumentale à réaliser en partie avec des matériaux utilisés par Gustave Eiffel pour la construction d’un pont de chemin de fer traversant l’Adour à Bayonne. Le pont a été acheté par le consortium chinois East Coast, promoteur d’un environnement immobilier de 20 hectares à Shunde, à une heure de voiture de la ville de Guangzhou (Canton). Au sein de cet ensemble immobilier, un parc d’environ 3 hectares sera mis à la disposition d’une cinquantaine d’artistes Chinois et Occidentaux parmi lesquels de jeunes artistes mais aussi des artistes de renommée internationale, tels que SUI JIANGUO, YUE MINJUN, FAN BO, et PAT ANDREA, BRUNO DURIEUX, PETER KLASEN .
Fan Zhe a vécu de nombreuses années en France où il a côtoyé les plus grands artistes et participé à de nombreuses manifestations. En 2002, il a réalisé une enquête sur l’art monumental et urbain à Paris et publié un livre où photographies et réflexions s’entremêlent. Il est devenu le fondateur et le directeur artistique du projet “P’Art Sino-Français” et a construit progressivement une jeune équipe dévouée à l’art. La famille et les amis se joignent à l’équipe et s’adonnent au développement du projet.
Son épouse Lei Syin appelée Sissi a été étudiante en peinture chinoise à l’Académie des Beaux-Arts et a aussi vécu à Paris où ils se sont rencontrés. Tous les deux, travailleurs et passionnés d’art contemporain, deviennent le cœur de l’équipe.
Le pont de Gustave Eiffel était long de 270 mètres et large de 14 mètres. Est-ce un hasard si la sculpture de Klasen fait 14 m de large ? Peter Klasen est le premier artiste à s’être rendu dans l’entrepôt de la région parisienne où ont été stockés les morceaux tronçonnés du pont Eiffel, arrivés de Bayonne. Une fois choisis les tronçons les mieux adaptés à son projet (dont il avait déjà en tête une première ébauche bien établie), ils sont expédiés en Chine par voie maritime.
Peter Klasen a effectué plusieurs dessins de son projet de sculpture et a fait appel à un jeune architecte parisien Nicolas Payan à qui il a confié la réalisation de la maquette et des plans en 3 D d’après ses directives et propres dessins.
Fin septembre, la maquette et les plans sont envoyés en Chine.
Trois mois ont suffi à l’équipe formidable de Fan Zhe pour réaliser la conception de cette œuvre magistrale de 75 tonnes / 9,50 mètres de hauteur / 224 m2 (14 m x 16 m) plus de 2 000m3.
Dans les années 70, Alain Peyrefitte écrivait « Quand la Chine s’éveillera… ». Aucun doute pour dire aujourd’hui qu’elle est très bien réveillée !
« La Chine est bien lancée à grande vitesse dans le troisième millénaire, et les Chinois sont au travail, loin de nos 35 heures. Tout va très vite dans ce pays dynamique qui brûle les étapes traditionnelles du développement et dont la vitalité et les ambitions sont considérables. Dotée de nombreux atouts et d’un dynamisme contagieux, la Chine s’est ouverte sur le monde il y a 25 ans, et aujourd'hui, elle change le monde qui s’ouvre à elle par ses forts taux de croissance, par la montée en puissance de son industrie et de son économie. » Elle a aussi la volonté de promouvoir la culture et l’art contemporain non seulement chinois mais aussi avec une large ouverture sur les artistes contemporains occidentaux. »
Peter Klasen peut en témoigner après ses visites dans les écoles des Beaux-Arts où il a échangé des points de vue avec les étudiants, fait des conférences, ainsi que lors des visites de centres d’art, de galeries et d’ateliers d’artistes : tous ces lieux n’ont rien à envier aux institutions occidentales. Les Chinois sont bien présents dans le monde de l’art contemporain et comptent y rester car la relève est assurée avec près de 10 000 étudiants pour les deux campus d’écoles des Beaux-Arts de Guangzhou / Canton, troisième ville de Chine et sans doute la plus riche.
A son arrivée dans le parc de Shunde, trois jours avant l’inauguration de sa sculpture monumentale de 9,50 mètres de hauteur et de 14 mètres par 16 au sol, Peter Klasen constate que l’œuvre n’est pas totalement achevée mais il n’a aucun doute sur l’agenda et peut même se permettre de modifier telle couleur ou tel aménagement de dernière minute. Au premier coup d’œil, il voit que l’ensemble de plus de 2000 m3 reposant sur une plate-forme de 224 m2, est respecté au cm près ! Tout sera terminé le jour ‘’J’’ malgré une journée de pluie intense et continue pendant 24 heures.
Trois jours plus tard, le 13 janvier, jour de l’inauguration, le soleil est là et les officiels, journalistes, artistes et étudiants des beaux-arts peuvent admirer l’œuvre « Bonjour Monsieur Eiffel ». L’enthousiasme est unanime ! Klasen peut être fier de sa réinvention de l’œuvre d’Eiffel.
Après avoir signé l’œuvre sur sa base, il prend la parole pour expliquer sa démarche, remercier et dire à tous les exécutants de cette prouesse qu’ils peuvent être fiers du travail réalisé en un temps record. C’est la Chine d’aujourd’hui.
Incontestablement, Peter Klasen se démarque des autres artistes du parc, d’abord par l’ampleur, le monumentalisme, « l’esprit Eiffel », tout ce qui est cher à Fan Zhe, mais aussi par la réflexion personnelle et perceptible de Peter Klasen de cette « nouvelle Chine » qu’il fait apparaître dans sa sculpture. C’est peut-être pour cette raison que Fan Zhe a réservé un environnement particulier à l’œuvre de Peter. Elle est située au centre d’un petit complexe de verdure, d’arbres fraichement plantés, de rivières, de petits immeubles de deux étages et de maisons style Bauhaus. Ce complexe lui-même est entouré d’une ceinture de plusieurs dizaines de buildings de 50 étages qui, comme dans le rôle d’une « Grande Muraille », protège le nouvel ensemble né de la volonté d’un groupe audacieux qui participe à la promotion de l’art contemporain de la Chine d’aujourd’hui.
Cette Chine d’aujourd’hui, Peter Klasen l’a très bien appréhendée à travers « Bonjour Monsieur Eiffel » car si on retrouve certains éléments récurrents de son travail comme l’enfermement, les matériaux industriels, le monde mécanique, l’ingénierie… il y montre aussi la relation étroite avec le monde qui s’ouvre aujourd’hui aux Chinois, représenté par le gigantisme, l’assemblage, la construction. Sans oublier ces trois poutres d’Eiffel culminant à 10 mètres du sol en direction de sommets infinis. On peut même voir à travers « le grand mur » les ouvertures qui laissent deviner un autre monde, ce « monde des temps modernes »…
Quelle a pu être la démarche de Peter Klasen dans l'allusion faite à Courbet dans le nom de son œuvre ? Outre deux génies aux prénoms communs vivants à la même époque dont, aujourd'hui, l'un regarde l'autre de la rue à Paris portant son nom et réciproquement : ne voit-on pas la rue Gustave Courbet de la Tour Eiffel ? Certes il y a quelques liens quand bien même anecdotiques, mais sans doute rien de tout cela dans l'allusion.
Le résultat est spectaculaire, «"Merci Monsieur Klasen"
Document rédigé par Philippe-Charles Ageon p.ageon@free.fr
Excellente galerie François Mansart. Elle m’a permis le plaisir d’un commentaire chaleureux sur Patrick Alphonse photographe hors des sentiers battus. Aujourd’hui, et jusqu’au 29 juin, elle propose le travail d’un artiste du rêve.
Yves Sarrans présente de grands formats où brillent de petites choses ! Quand peut-on dire d’un grain de sable, qu’il forme un tas avec la coopération d’un autre grain de sable, et puis d’un autre et puis…. Même question pour les fortunes, à partir de combien de millions d’euros etc… Yves Sarrans, pose de grains, des pixels ? Des atomes ? Ce sont des photos de dunes, des photos de sables ? Des photos de rien ? Des photos qu’on ne devrait pas prendre puisqu’il n’y a rien à voir ? On ne voit rien ? A partir de combien de pixels voient-on quelque chose dans une photo numérique ?
Yves Sarrans fait partie des photographes qui ne doutent pas qu’il y ait quelque chose à voir et qui s’efforcent de le montrer. Deux choses apparaissent dans ses photos. Des couleurs qui ne se voient pas. Ou très, très peu (à partir de combien de « peu » les couleurs disparaissent-elles ?). Comme il photographie entre chien et loup, les gris et les noirs, ne permettent pas de distinguer les couleurs, elles sont là pourtant, il n’y a pas « nulles couleurs » ! Seulement des grains épars ou des poussières, atomes de couleurs. Des morceaux de pixels si cela était possible ! Et par ailleurs, il fait venir un monde interrompu. Les sables bougent. Ce qu’il a photographié, à l’instant, aura disparu quelques secondes après. Ne dit-on pas les « sables mouvants » ? L’artiste figerait ce moment qui voit le sable se mouvoir, comme les vagues, comme l’eau, comme les nuages ou le brouillard, tous composés de particules, de grains qui roulent les uns sur les autres ou qui flottent de concert.
Au-delà, cependant, rien n’est montré ! Entrez dans la galerie et faites face aux photos, rien à voir ? Si ce n’est des grains qu’on pourrait croire argentique, si ce n’est des points éparpillés et parfois rassemblés, concentrés, comme il en est d’un trait, d’un mot écrit qu’on aurait photographié au plus près. Des photos ? En considérant attentivement le travail du photographe, on pense tout à coup que ce pourraient être des dessins. Comme ceux qu’on voit de plus en plus souvent, sur des feuilles gigantesques et qui couvrent de signes minuscules toute une surface blanche ou, au contraire, les concentre en certains emplacements pour les laisser ensuite errer dans des espaces indéfinis de la feuille immaculée.
Abstractions ? Mais non, Yves Sarrans a bien eu des morceaux de nature en face de lui ! Il n’a pas imaginé ce qu’il nous montre, il l’a découvert. Explorateur de « l’invu » plutôt que de l’invisible, il livrerait des apparitions ? Je pense plutôt qu’il propose au regardeur des supports à la rêverie, à la méditation. Rien de violent dans ces grandes photographies. Tout est y calme et serein. Tout y capte le regard, ou, plus précisément, appelle le regard à venir se poser, ici sur ce qui parait un repli neigeux, là, sur ce qui serait l’envol éblouissant d’un être innommé ou bien séracs d’un glacier, foehn, lucioles par milliers qui formeraient un voile sur le soleil.
Non pas d’abstractions, tout ceci est bien réel, sauf que vous ne le verrez plus, c’est passé et cela ne reviendra pas, diffus comme une brume, mystérieux comme un brouillard. Et pourtant plus solide qu’une fumée. Aussi vrai que le rêve qui viendra. Aussi changeant avec l’humeur du regardeur.
Architectures
Francesca Piqueras.
Encore une bonne pioche pour la galerie Business of Art, qui a démarré très fort, lancée magistralement par Philippe Ageon au début de l’année.
La photographe, Francesca Piqueras, travaille depuis sept ans sur des instruments et des thèmes qui la passionnent depuis fort longtemps. Issue d’une famille d’artiste, elle est familière avec les idées qui agitent l’art contemporain, son regard y a acquis précision, discipline et inspiration.
La série de photos que BOA présente est composée de trois grands thèmes
L’un porte sur la fin des navires : chantiers de démolition de bateaux, cargos, navires de croisière, pétroliers en tous genres et de toutes nationalités. S’y ajoutent des photos de navires abandonnés, des bateaux, laissés, là en plan, parce que cela coûte encore moins cher de les « oublier » sur une côte après les avoir échoués au mépris de toutes les règles internationales. Carcasses rouillées, navire funèbres, ils sont saisis par la photographe dans des paysages sublimes, sable blond, eaux d’un bleu de rêve, ciels immaculés, règne du soleil, de la chaleur pure. … « mais rendre la lumière suppose d'ombre une morne moitié » disait Valery. Les photos de l’artiste, répondent étrangement au poête, montrant cette part d’ombre et les monstres qu’elle ne dissimule même pas. Faut-il parler de la beauté des soleils noirs ?
On la retrouve cette beauté étrange dans une série sur les restes métalliques des défenses maritimes avancées de l’Angleterre pendant la Seconde Guerre mondiale. Les photos sont saisissantes de puissance et présence. Des monstres gigantesques, les uns tripodes, les autres quadripodes, semblent s’avancer dans les flots avec des allures de machines martiennes, de vieux engins de combats, rebuts de grands combats de la Guerre des Etoiles. La part d’ombre parait ici animée, la rouille des parois tient lieu d’une peau lacérée, tous ces êtres étranges, seraient en route vers les lieux où on dépèce les navires, héros fatigués à la démarche fragile.
Et puis, tout n’est pas perdu, le monde n’est pas condamné à ce combat entre ombre et lumière, vie et mort, machines en perdition contre la nature que leur décomposition corrompt, Francesca Piqueras, se plait à montrer les grands espaces dans lesquelles, tout au loin, les machines font semblant d’être des villes illuminés, comme si l’horizon cessait d’être une ligne imaginaire et se muait en un lime brillant de mille feux, accueillant et joyeux. Les lumières sont pures et profondes, l’eau, le ciel, les nuages s’assemblent en harmonie de bleus et, tout au loin, d’autres lumières pareilles à des lucioles ponctuent l’immensité.
C’est à voir chez Business of Art, 11 rue d’Artois, 75008
Exposition des photos de Louis-Paul Ordonneau dans la galerie BOA animée par Philippe Ageon. 11 rue d’Artois.75008, jusqu’au 30 avril.
Ce qui reste après destruction, oubli, mépris, est resté et s’oppose au regard. Les débris, les restes, les murs rongés d’humidité, les câbles qui mutent en instruments de torture méritent-il un regard ? Un instant d’attention, un cliché et même une photo à développer ?
Louis-Paul Ordonneau a sûrement pensé que « oui, bien sûr » on peut tout voir, tout montrer, y compris ce qui passe inaperçu. L’infime, l’insensé, le cassé ont leur mot à dire, ou plutôt leur image à montrer. Pas nécessairement une image « destroy ». Pas une image de rage destructrice. Pas non plus la preuve à de multiples exemplaires d’un capitalisme démolisseur. L’artiste n’a pas besoin de placard pour énoncer ce qu’il dénoncerait. Il ne se cache pas non plus derrière des « sans titre 1, 2, 3 ». Ou des « pris le 5 décembre/ 2b », pour créer ces fameuses distanciations par lesquelles l’artiste pense annoncer qu’il n’est pas même dupe de lui-même ni de ce qu’il fait. Louis-Paul Ordonneau montre ce qu’il a vu. Ce qu’il est allé chercher, afin de mieux voir le fétu de béton, pour isoler le graffiti timide d’un rappeur encore un peu gamin, pour surprendre un caddy aux allures familières du bon vieux domestique.
Ce ne sont pas des texturologies, réincarnations d’œuvres de Dubuffet. Il ne s’agit pas d’évoquer le dessous des choses, les sédimentations qui façonnent les sols. Louis-Paul Ordonneau a photographié ce qui vient au regard, sans imaginer le dessous des choses, sans creuser pour en trouver un morceau. Il a cherché ce qui pouvait être vu à condition d’avoir envie de voir. Rien d’essentiel n’est invisible. Ce qu’on ne voit pas c’est ce qui ne nous intéresse pas. On passe à côté. On passe sans y penser. On passe sans voir et parfois même on piétine ce qui gêne notre cheminement et évidemment on le fait disparaître.
Il suffit de vouloir voir et surtout d’aimer rechercher ce qui est à voir. C’est ainsi que des lavabos retrouvent leur place dans une construction bien ordonnée, bien charpentée. Une verrière ouvre sur, quoi ? Un jardin, un parc, un confetti de verdure. Ce n’est pas très important, la verrière chante et nous introduit, toute de guingois qu’elle est, toute déglinguée à force d’oubli, dans un autre univers, par de là les vitres brisées, opaques et sales. Des graffitis font chanter un mur, d’un jaune délicat et d’un trait léger. Des coups de pinceaux maladroits ont laissé leurs traces et donnent un mirage de ciel rouge sur mer bleue. Le rien et le brisé ne sont pas nécessairement sinistres et sombres. L’artiste en fait une belle démonstration par couleurs et parfois stridences interposées.
Les photos, de toutes tailles, parlent pour elles-mêmes, accessibles directement bien que certaines méritent un petit bout de commentaire : les photos américaines, deux, qui ont été prises à New-York juste avant que l’ouragan ne se déchaîne. New-York vidée de ses habitants, fantomatique ! Rien ! Rien que des restaurants, des brasseries, des boutiques vides de client, vide de serveur ou de vendeuse. Personne. Voilà, lumineux dans ce vide, une brasserie clinquante, vibrante, colorée et transparente. Dans cette brasserie, rien. Toutes les tables sont vides. Seuls êtres humains : le photographe et sa femme, ombres reflétées, lointaines et transparentes, penchées sur un néant coloré et lumineux. Cette photo est si étonnante qu’on a vu un visiteur américain planté devant et, finalement demander l’adresse précise !
Belle exposition d’un jeune artiste à suivre.
Jacques André.
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