Les montagnes sont blanches lorsqu’on s’obstine à les regarder dans leur état de nature comme si elles venaient, pareilles à Vénus, de sortir de l’onde. Les Montagnes ne sont blanches que si on les réduit au seul rôle de pente à ski. Il est vrai, tous les skieurs le diront, que dévaler des pentes couleur framboise, puis passer à des schuss sur de la menthe poivrée, est très déstabilisant. Ceci n’est plus possible. Même les rayons du soleil couchant, dont on sait qu’ils sont capables de colorer les linceuls les plus blancs et les rochers les plus sombres, ne peuvent plus rien pour la neige : les canons à neige interviennent aussitôt qu’une couleur se met sur la montagne. Ils restaurent le blanc à la moindre atteinte et offrent au skieur le confort d’une matière première de qualité supérieure, inaltérable et monocolore.
Les soi-disant puristes diront qu’il en est de la montagne comme du golf : on n’imaginerait pas un fair-way « violet » et un green « rouge » ! Ces deux sports ont en commun de nombreuses choses : la passion pour le matériel, qui trouve à s’exalter dans les techniques les plus sophistiquées, la simplicité du propos, descendre une pente pour l’une, mettre une balle dans un trou pour l’autre et surtout, surtout, un aspect monocolore et standardisé : le vert pour les parcours de golf où qu’on soit, et le blanc pour les montagnes quelles qu’elles soient.
C’est dit, les montagnes, comme les cathédrales sont blanches.
Eh bien, non justement. Les montagnes blanches sont à la montagne ce que la baguette et le béret sont au stéréotype du Français. La neige dont elles sont faites n’est blanche qu’à raison d’une certaine combinaison de longueurs d’ondes. Si on les dissocie, ce qui est une expérience de base depuis le XVIIème siècle, apparaissent les couleurs de l’arc en ciel : 7 d’un coup…et voilà que la neige se met à rosir, à rougir, à verdir …
Et voilà que la montage redevient enfin naturel, brillant de mille feux au lieu, blanchâtre comme une « beauté d’hôpital », d’aller flatter « les poètes des chloroses » que dénonçait Baudelaire.
C’est la nuit que la montagne prend toute sa dimension. Finis les sommets rasoirs qui ne cessent de vous tancer et de vous envoyer leurs défis dérisoires. On peut comprendre que lorsque l’Homme était encore collé à la terre, à sa glèbe, à son village, les sommets aient pu représenter un idéal. « Je te gravirai » était aussi naturel aux audacieux que le « Usque non ascendam » de Fouquet aux ambitieux. Monter c’était quitter l’univers tranquille pour se risquer à perturber le sommeil des Dieux. Monter c’était transgresser et cesser de se souffrir petit. Il suffisait de gravir les pentes pour se sentir grand. Bientôt ce sentiment serait partagé au point que Nietzsche lui consacrerait quelques pages sévères.
Aujourd’hui, pourtant tout a changé : comment peut-on encore s’émouvoir à la vue d’une montagne, si grande soit-elle, quand d’autres enthousiasmes, et de plus puissants, saisissent l’Humanité à la recherche de la hauteur et du lointain sous la forme de voyages interstellaires ou de photos d’amas d’étoile livrées par les satellites.
Non, décidément, la montagne n’est plus qu’un charmant souvenir d’émotion primitive lorsqu’on la voit comme elle était vue par les visiteurs d’il y a seulement un siècle : blanche et détachée sur fond de ciel bleu. Toutes les montagnes ont cette même tête un peu ennuyeuse, très différentes de la mer pour prendre l’exemple d’un élément de la nature qui sait encore tirer des larmes de joie ou d’émotion. La mer est changeante et sans cesse se renouvelle. C’est là son charme principal. La montagne, rigide et fermement campée est conçue pour ne jamais bouger et donc ne jamais changer.
La vraie montagne, de nos jours, on la trouve en bas des sommets, dans les villages illuminés la nuit, dans les hôtels qui montrent la neige et la montagne sous leur angle le plus sympathique : la fête qui resplendit et dont les lumières sont renvoyées encore et encore par les vitres, les vitrines, les cristaux de neige et les cristaux de baccarat.
La lumière, les couleurs écrasent les formes dira-t-on : elles détournent la montagne de son rôle premier, celui de montrer le ciel aux hommes. Et il est vrai que dans ces quelques photos on aurait bien du mal à identifier neige, montagne ou autres choses qui se trouvent dans cet environnement.
Peu importe : les photos m’ont semblé mieux évoquer la montagne que toutes les cartes postales de la terre.
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